Résumé
L’organisation des JOP 2030 n’est acceptable qu’avec une validation démocratique par référendum, et en garantissant le respect des limites planétaires, la compatibilité avec la préservation absolue des sites et de la biodiversité.
Sans le respect de conditions environnementales et sociales, Les Écologistes considèreront que ces JOP sont socialement et environnementalement inacceptables, et s’opposeront à leur organisation.
Ils invitent à une réflexion d’ensemble de tous les acteurs sur la refonte des grands évènements sportifs et culturels, questionnant leur modèle au regard des urgences climatiques, environnementales et sociales.
Exposé des motifs
Contribuer à l’édification d’un monde pacifique et meilleur est un principe fondateur de la Charte olympique. Même si la focalisation des Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) sur la nationalité des participant·e·s exacerbe les nationalismes, ils peuvent être de réels moments partagés de promotion de la tolérance, de la paix, de dépassement des frontières et des conflits, et de solidarité entre les peuples. Dans le contexte actuel, cela mérite d’être rappelé et souligné.
Les JOP sont indéniablement des évènements suscitant un enthousiasme largement partagé partout dans le monde, même si cette réalité est moindre pour les JOP d’hiver que pour ceux d’été.
Mais en tout état de cause, la passion populaire pour les JOP et les valeurs de paix qu’ils portent ne peuvent se vivre et s’exprimer dans un cadre, qui, au-delà des mots de pur affichage de leurs promoteurs, est marqué par une indifférence effective aux questions environnementales, sociales et démocratiques.
Les milieux montagnards sont aux avant-gardes du réchauffement climatique et de la perte de biodiversité : la diminution de l’enneigement naturel, l’accélération de la fonte des glaciers, l’augmentation de la fréquence et de l’intensité des pluies extrêmes, exercent de très fortes pressions sur l’ensemble des écosystèmes de montagne, impactent la disponibilité de ressources vitales comme l’eau, mettant en cause l’habitabilité future de ces territoires.
Les enjeux autour de ce type d’événement sont colossaux : ils impliquent débat contradictoire, information réelle des citoyen·ne·s et validation formelle de leur part. Ce ne peut être uniquement le projet de responsables d’exécutifs régionaux et de quelques « grands noms » du monde sportif à la recherche de notoriété et de grands événements associés à leur nom.
La candidature des « Alpes françaises » aux JOP 2030 est un déni de démocratie, au détriment de l’environnement mais au service des ambitions politiques de Laurent Wauquiez et de Renaud Muselier. Cette candidature est seule en lice : celles de la Suisse et de la Suède ont été écartées essentiellement parce qu’elles auraient été soumises à des consultations des citoyen·ne·s. Cela en dit long sur les critères du CIO pour faire survivre un évènement au modèle contestable et de plus en plus contesté.
Les présidents des Régions AURA et PACA se livrent de plus à d’intolérables chantages aux équipements et aux subventions, conditionnant le financement de tel ou tel équipement ou l’obtention de telle ou telle subvention au soutien à la candidature aux JOP 2030.
Ils font état d’un soutien large de la population à ces JOP, en se basant sur des sondages d’opinion biaisés et aux questions pour le moins fallacieuses1. Ces sondages ne sauraient être significatifs d’une adhésion populaire.
Alors que ni chiffrage sérieux, ni élément organisationnel précis, ni modalité pour diminuer les émissions de GES n’ont été fournis, les présidents promettent des Jeux vertueux2. Les mêmes affirment que les JOP 2030 permettront d’amener dans les Alpes les trains qui leur font aujourd’hui défaut3.
Personne n’est dupe du « greenwashing » entrepris par eux. Comment osent-ils vendre des JOP « vertueux » alors que l’un veut se mettre en marge de la loi sur le ZAN (zéro artificialisation nette), que la politique ferroviaire de l’autre est déliquescente au point qu’il est impossible de réaliser entre 2024 et 2030 ce qui n’a pas été engagé sur les lignes des Alpes depuis 2017, que les deux sont d’ardents défenseurs des retenues collinaires et des canons à neige, et soutiennent massivement les lignes aériennes acheminant les touristes européens vers les aéroports régionaux ?
La phase finale de préparation des JOP de Paris invite à la prudence, tant les annonces en contradiction totale avec les vertueuses promesses initiales se succèdent, en matière de transport, de logement, de libertés individuelles, de protection de l’environnement.
Cette candidature interroge sur les moyens alloués aux évènements sportifs internationaux4 : entre Paris 2024 et les potentiels JOP 2030, la facture pourrait avoisiner 5 milliards d’€. Alors que nous manquons d’argent public pour les hôpitaux, pour que plus un enfant ne dorme à la rue, pour la transition énergétique, cette candidature risque de nous faire prendre un retard supplémentaire dans la trajectoire zéro carbone définie par les accords de Paris. Elle est contraire à l’objectif 13 des Objectifs Développement Durable des Nations Unies : « prendre d’urgence des mesures pour lutter contre les changements climatiques et leurs répercussions ». La montagne a besoin plus que jamais de moyens financiers et humains pour repenser son modèle économique et accompagner la création d’activités permettant d’y vivre toute l’année. Quinze jours de fête « artificielle et médiatique » pourraient entretenir un modèle obsolète, alors que nous devons impérativement agir pour la transition de nos territoires et la préservation de nos ressources naturelles.
Comme tous les grands évènements sportifs et culturels, les Jeux Olympiques doivent être questionnés et réinventés pour être populaires, accessibles au plus grand nombre, compatibles avec le respect des limites planétaires et bénéfiques pour les territoires.
Motion
Les Écologistes affirment que l’organisation des JOP 2030 dans les Alpes françaises ne serait acceptable que :
- avec une validation démocratique par un référendum, qui est demandé par les associations et collectifs, avant toute validation par les collectivités concernées et par le gouvernement français, et avant toute annonce de la désignation officielle par le CIO,
- préparée par une procédure de débat public porté par la CNDP (Commission Nationale du Débat Public),
- en respectant des conditions sociales, climatiques et environnementales strictes citées en annexe,
- en garantissant leur compatibilité avec la préservation absolue des sites et de la biodiversité et en respectant les limites planétaires.
Toutes ces conditions n’étant actuellement pas réunies par les promoteurs de l’évènement et les organisateurs, les Écologistes considèrent et affirment à ce jour que le projet de JOP 2030 est incompatible avec les limites planétaires environnementales et climatiques, socialement inacceptable et élitiste, et s’opposent donc à son organisation.
Les Écologistes invitent à une réflexion d’ensemble de fond des acteurs de la vie sportive et culturelle sur la refonte des « Grands évènements sportifs et culturels » pour questionner la pertinence de leur modèle au regard des conditions climatiques, environnementales et sociales.
A cet effet, il est créé au sein du mouvement Les Écologistes un groupe de travail « Grands évènements sportifs et culturels », animé par la Commission Sports Loisirs Tourisme et par la Commission Culture afin de conduire la réflexion du parti et d’en soumettre les résultats dans les meilleurs délais au Conseil fédéral.
Pour : beaucoup ; blanc : 1
1https://ram05.fr/jeux-olympiques-2030-dans-les-alpes-le·sondage-acrobatique-de-la-region-paca
2 » avec une spécificité autour du développement durable pour démontrer [la] capacité [des régions candidates] de développer nos montagnes en prenant soin de notre environnement. » (Renaud Muselier – Les 4 vérités – France 2 – 22 novembre).
3 » La ligne des Alpes est au cœur de la candidature : elle représente une augmentation des moyens, des budgets et du service ferroviaire proposé. » (Jean-Pierre Serrus, VP en charge des transports de la Région PACA – Dauphiné Libéré – 05 octobre 2023).
4 https://www.vie-publique.fr/en-bref/287860-jo-de-paris-2024-quel-cout-public
Retour sur les motions adoptées par le Conseil fédéral d’Europe Écologie Les Verts
des 17 et 18 février 2024
Annexes
1/ Conditions sociales et environnementales
Ces Jeux Olympiques d’Hiver pour être acceptables doivent répondre aux conditions suivantes :
- intégrer les évolutions du climat dans leur conception, avec un conditionnement des aides publiques à une division par 2 des émissions de GES*
- respecter scrupuleusement le droit du travail, garantir aux travailleur·se·s de bonnes conditions salariales, de travail et de logement
- respecter les objectifs de réduction de l’artificialisation des sols de 50% en 2030 par rapport à la période 2011/2021
- organiser les compétitions dans des infrastructures 100% existantes et se déroulant exclusivement dans des stations maximisant les conditions d’enneigement naturel et n’impliquant aucune construction de retenues collinaires non existantes en 2023
- se donner les moyens d’une priorité absolue aux mobilités décarbonées, en train notamment (état des infrastructures, matériel roulant en quantité suffisante, personnel en nombre …), en limitant et conditionnant les accès individuels aux sites, en réduisant de moitié le transport aérien des athlètes et des délégations en réservant l’utilisation des hélicoptères aux seuls moyens de secours et de sécurité
- garantir la préservation totale (100%) des sites et de la biodiversité
- ne produire et ne consommer aucun objet à usage unique, proscrire les goodies et assurer 100% des achats responsables
- garantir une alimentation d’origine locale et produite avec des méthodes durables
- renoncer aux partenariats de sponsors dont les activités sont incompatibles avec le respect de la planète et/ou des droits humains
- être populaires et accessibles (au moins 50% de billets à moins de 20 € / 90% des billets réservés aux habitant·e·s des régions concernées)
- encadrer drastiquement les locations de courte durée sur les sites et dans les régions pour préserver le droit prioritaire au logement des habitant·e·s à l’année et des saisonnier·e·s.
2/ Rapport de la Cour des Comptes :
Les stations de montagne face au changement climatique – février 2024