Résumé
Dans la continuité des deux motions en Conseil Fédéral en soutien aux femmes afghanes et aux femmes iraniennes votées à l’unanimité ;
Ainsi que de notre implication sur ces questions et le suivi de ces deux motions en lien avec des expert·e·s, collectifs et personnalités internationales. Aujourd’hui encore nous soutenons l’exfiltration des femmes afghanes et mettons en place des process de suivis pour une intégration digne ;
Il est important que nous continuions à soutenir aussi les initiatives militantes et juridiques sur la reconnaissance de l’apartheid de genre.
Exposé des motifs
Depuis 2021, les femmes et les filles afghanes vivent sous un régime répressif qui limite toute participation à la société et restreint drastiquement leur liberté de mouvement et toute possibilité d’émancipation.
En 2022, les talibans ont interdit aux filles et aux femmes afghanes d’accéder à l’éducation, aux universités et au monde du travail, privant ainsi plus de 2,5 millions de filles et de femmes de leur droit à l’éducation et au travail, les réduisant à une pauvreté et une dépendance extrême.
Toutes les femmes afghanes ont été interdites de l’exercice de la médecine alors qu’elles sont les seules à avoir le droit de soigner d’autres femmes, livrant ces dernières à la maladie et à la mort.
En mars 2024, les talibans ont annoncé le retour de la condamnation à mort par lapidation pour les femmes adultères et encouragent les juges à la prononcer.
Fin Août 2024, une nouvelle loi sur la « promotion de la vertu et la prévention du vice » promulguée par les autorités condamnée fermement par les l’union interparlementaire (UIP).
Les dispositions de cette nouvelle loi prévoient entres autres des codes vestimentaires discriminatoires, des restrictions de circulation et l’interdiction pour les femmes de parler et chanter en public et constituent non seulement des violations flagrantes du droit international, mais servent également à déshumaniser la moitié de la population.
Sahar Fetrat, experte de l’Afghanistan explique que « les talibans réduisent les femmes et les filles au statut de non-humains »
Aujourd’hui, plus que jamais, les filles et les femmes afghanes sont piégées dans une prison à ciel ouvert, interdites d’en sortir sans être accompagnées d’un homme.
Lors de la réunion du 18 septembre 2024 du conseil de sécurité, une des femmes que les écologistes a pu exfiltrer s’est exprimée en ces termes » ils m’ont pris ma liberté et ont décidé de mes vêtements, de mon comportement, des personnes avec qui je devais aller et de ma capacité à vivre ou mourir » » Elles (les femmes afghanes) attendent que nous les aidions à sortir de ce cauchemar »
Toutes ces persécutions font écho à celles conduites en Iran qui dispose également d’un corpus législatif conservateur reléguant toutes les femmes iraniennes au rang de citoyennes de seconde zone.
Le non-port de l’hidjab islamique est passible de 74 coups de fouet et cette sanction va être aggravée par un nouveau projet de loi “sur la pudeur et le hidjab”.
La part d’héritage d’une femme représente la moitié de celle d’un homme.
Une femme ne peut obtenir un passeport ni voyager sans l’autorisation de son tuteur, c’est-à-dire son père ou son époux.
L’époux a le droit d’empêcher sa femme d’exercer toute profession qui porte atteinte à sa « dignité » ou à celle de sa femme. Le code civil iranien fait du mari le « gardien » de sa femme, qui a besoin de son autorisation même pour quitter le domicile et l’épouse doit résider dans le logement que le mari choisit pour elle.
De plus, le témoignage d’un homme dans les instances judiciaires et devant le tribunal vaut celui de deux femmes.
Le viol conjugal ne constitue pas un crime mais au contraire, une femme qui refuse de se soumettre au désir de son mari peut être accusée de “non-obtempération” et traduite en justice.
Le mariage des filles avant l’âge de la puberté est autorisé avec l’accord du père ou du grand-père paternel.au printemps 2021, le nombre de mariages de jeunes filles âgées de 10 à 14 ans avait augmenté de 32 % par rapport à l’année précédente.
Ainsi la loi relative au « rajeunissement de la population », mise en œuvre grâce à l’interdiction et à la criminalisation de l’IVG, et aux sanctions prises à l’encontre des équipes médicales, a entraîné une forte augmentation du nombre d’avortements clandestins ou à risque, mettant en péril la vie des femmes qui, faute de pouvoir s’adresser à l’hôpital ou aux centres médicaux agréés, y recourent dans des conditions précaires.
On assiste depuis 1979, à la création d’un apartheid du genre relatif au port du voile obligatoire, contrôlé quotidiennement par la police des mœurs instaurée en 1981 et qui donne lieu aujourd’hui à une véritable traque des iraniennes se montrant en public sans le voile, occasionnant arrestations, enlèvements, viols en détention, exécutions dont l’assassinat de Mahsa Jina Amini, le 16 septembre 2022, il y a tout juste 2 ans, par la police des mœurs iraniennes, pour un voile mal porté.
Depuis lors, les organisations internationales telles que le Conseil des droits de l’homme dans un rapport de 2023, définit l’apartheid sexiste, selon une définition adaptée du statut de Rome, comme suit : « les actes inhumains commis dans le cadre d’un régime institutionnalisé d’oppression systématique et de domination d’un des genres sur tout autre genre ou sur tous les autres genres et dans l’intention de maintenir ce régime».
De plus, dans un rapport de mars 2023, la Commission internationale des juristes (ICJ) et Amnesty International ont analysé que ces violations des droits humains à l’encontre des Afghanes pouvaient relever de la qualification de crime contre l’humanité et de persécution de genre.
Par ailleurs différents appels d’un collectif de militantes afghanes et iraniennes ont interpellé l’ONU où une commission, préoccupée par la situation en Afghanistan, examine avec de nombreux et nombreuses expert·e·s, l’inscription de l’apartheid de genre comme un crime contre l’humanité déclarant le 20 février 2024 que « L’apartheid de genre n’est pas simplement une possibilité théorique ou une construction juridique, mais une menace réelle et une réalité vécue par des millions de femmes et de filles à travers le monde – une réalité qui n’est actuellement pas explicitement codifiée dans le droit international ».
En Avril 2024, un signal fort de la part de cette même commission et des juristes d’Atlantic Council qui ont obtenu l’accord de pays partenaires, dont la France jusqu’à présent ne fait pas partie, pour l’inclusion de crime d’apartheid de genre au droit international.
Et enfin, le 18 septembre 2024, lors du conseil de sécurité de l’ONU, il a même été proposé par la Directrice exécutive d’ONU-Femmes, qu’au moins 30% de tous les financements destinés à l’Afghanistan soient consacrés à des initiatives ciblant directement l’égalité des sexes et les droits des femmes et d’arrêter de financer en fermant les yeux sur la situation.
Motion
Dans la continuité de notre soutien et de nos actions, le Conseil Fédéral décide :
De condamner la discrimination systématique des femmes inscrites dans les lois et les politiques des régimes tels que ceux d’Iran et d’Afghanistan ;
De contraindre l’État français à rejoindre les pays signataires de l’accord proposé par la commission de l’ONU pour l’inclusion du crime d’apartheid de genre comme crime contre l’humanité dans le droit international et d’exhorter le reste de la communauté internationale à reconnaitre ;
De demander qu’en France les victimes d’apartheid de genre bénéficient de la protection temporaire et du développement de moyens et de voies légales et sûres pour demander l’asile au sein de l’Union européenne
Unanimité pour
Retour sur les motions adoptées par le Conseil fédéral des Écologistes -EÉLV
des 5 et 6 octobre 2024