Résumé

Représenter la diversité à l’échelle locale, c’est garantir une représentativité fidèle aux principes d’égalité républicaine. C’est incarner notre projet écologiste : une transition juste, inclusive et capable d’embarquer largement. C’est affirmer que nous sommes un rempart contre l’extrême droite comme contre les logiques d’exclusion et de racisme systémique qui empêchent encore la pleine représentation de la mixité du pays. Pour traduire cette exigence en actes, le Conseil fédéral fixe un objectif minimal de 15 % de candidat·e·s issu·e·s de la diversité, par genre et cercle d’éligibilité, sur les listes municipales écologistes de 2026 dans les communes de plus de 100 000 habitant·e·s. Le Bureau politique est mandaté pour accompagner et assurer un suivi régulier devant le Conseil fédéral.

Exposé des motifs

L’enjeu de la représentation des personnes issues des minorités dites “visibles”, en particulier des personnes racisées, dans les exécutifs municipaux et sur les listes électorales écologistes est aujourd’hui crucial. Il relève à la fois d’un impératif démocratique, d’un marqueur de cohérence politique et d’une nécessité stratégique pour notre mouvement.


Nous voulons rompre avec les logiques d’invisibilisation, de confiscation du pouvoir et de reproduction sociale discriminante qui marquent encore profondément la vie politique française. Pourtant, force est de constater que, même dans les municipalités écologistes, la diversité reste marginale. Dans les grandes villes, la présence de personnes racisées dans les exécutifs demeure rare. Lorsqu’elles y figurent, de plus, elles se voient trop souvent assignées à des délégations secondaires ou “telle fléchée”, “catégorisée” (ex. jeunesse, sécurité…), parfois même sans visibilité ni moyens financiers suffisants pour mener à bien une politique locale ambitieuse, en faveur d’un projet de territoire.


Ce déficit n’a rien à voir avec un manque de compétence ou d’engagement. Dans les quartiers populaires, les actrices-teurs locaux se mobilisent, prennent des responsabilités et portent une vision politique pour l’avenir. Mais elles se heurtent encore à des barrières implicites : mécanismes de cooptation, reproduction des mêmes profils, légitimation par des réseaux et des codes sociaux dominants. Ces filtres invisibles empêchent la richesse de notre société de se traduire dans nos institutions.
Or, dans le contexte politique actuel, marqué par la progression de l’extrême droite et la banalisation des discours racistes, nous avons une responsabilité historique. Face à une idéologie qui cherche à délégitimer une partie de la population française, notre réponse ne peut être timide : elle doit être claire, offensive et crédible. Nous ne pouvons pas nous contenter d’appeler les électeurs et électrices des quartiers populaires ou issus de l’immigration à voter contre le RN, sans leur donner une véritable place dans nos instances.


Représenter la diversité à l’échelle locale, dans les villes, métropoles et intercommunalités, c’est garantir une représentativité fidèle aux principes d’égalité républicaine. C’est incarner notre projet écologiste : une transition juste, inclusive et capable d’embarquer largement. C’est aussi affirmer que nous sommes un rempart, non seulement contre l’extrême droite, mais aussi contre les logiques d’exclusion et de racisme systémique qui empêchent encore que la mixité réelle du pays soit représentée.


Au-delà d’une nécessité politique de faire société, cet enjeu est également électoral et stratégique. Une partie croissante de la population attend des signes et actes concrets : sur qui prend la parole, qui est placé en responsabilité, qui incarne le collectif. Si nous voulons élargir notre base sociale et faire franchir un cap décisif à l’écologie politique, nous devons répondre à ces attentes.. Il faut renouer avec le discours tiers-mondiste et anticolonial de notre mouvement, et l’actualiser.


C’est dans ce cadre que la motion propose un signal clair : fixer des objectifs de 5, 10 et 15% % de candidat·e·s issu·e·s de la diversité, pour chaque genre et chaque cercle d’éligibilité, sur les listes soutenues par le mouvement dans toutes les communes, en fonction de leur nombre d’habitant·e·s. Ce n’est pas un plafond, mais un seuil minimal. Il vise à rompre avec la sous-représentation structurelle, à briser les logiques discriminantes et à enclencher une dynamique durable. Le Bureau politique et les Régions accompagneront ce mouvement pour en garantir l’effectivité.


Cet objectif quantitatif doit s’accompagner d’une transformation qualitative : nouvelles pratiques de sélection, ouverture à des parcours divers, valorisation des engagements associatifs et militants. Chaque groupe local, chaque maire sortant·e, chaque instance régionale doit se saisir de cette exigence avec ambition.


C’est à ce prix que les élections municipales de 2026 pourront devenir un moment de réinvention, de rassemblement populaire et de démonstration de notre capacité à incarner une écologie sociale, inclusive et combative. Mais cette démarche ne doit pas s’arrêter là : elle devra être étendue aux législatives en cas de dissolution anticipée, et plus largement à l’ensemble de nos élu·e·s et de nos cadres.


La représentativité n’est pas une option, mais une condition de crédibilité. Pour devenir une force politique majoritaire, le mouvement écologiste doit refléter la société française dans toute sa diversité.

Motion

Vu les articles 13-3 et 13-5 des statuts ;
Vu l’article 13-3 du règlement intérieur ;
Vu la motion « Les Écologistes et la construction d’une union efficace pour 2027 » adoptée en Conseil fédéral le 10 octobre 2024 ;
Vu la motion « De la vague verte de 2020 à celle de 2026 » adoptée par le Conseil fédéral le 10 octobre 2024 ;
Vu le texte d’orientation du mouvement adopté le 19 avril 2025 ;
Vu la motion “Élections municipales 2026” adoptée par le Conseil fédéral le 14 juin 2025 ;
Vu l’état des lieux établi par le Bureau politique sur la représentation des personnes issues de la diversité au sein du mouvement ;
Vu la volonté d’évolution de notre mouvement pour porter une diversité active et la priorité politique de l’élargir et de le massifier à l’image de notre société ;
Le Conseil fédéral charge le Bureau politique de faire de la représentation effective des personnes issues de la diversité une priorité stratégique lors de la composition des listes pour les municipales 2026, dans toutes les communes.

Dans ce cadre, le Conseil fédéral :
• fixe des objectifs minimaux de représentativité des personnes racisées sur les listes présentées et soutenues par Les Écologistes comme suit : 5% dans les villes de moins de 15 000 habitant·e·s, 10% dans les villes de 15 000 à 50 000 habitant·e·s et d’au moins 15% dans les villes à partir de 50 000 habitant·e·s. Ces seuils minimaux sont valables pour chaque genre et pour chaque cercle d’éligibilité.
• Inscrit dans le Règlement Intérieur des Écologistes ces seuils minimaux pour les scrutins de liste. Ils seront adaptés, par motion votée en Conseil Fédéral, aux différents scrutins de liste autres que les élections municipales
• confie au Bureau politique et toute instance qu’il jugera pertinente la charge d’accompagner les groupes locaux et les maires sortants dans l’identification de candidatures issues de la diversité et dans la mise en place de moyens opportuns pour favoriser leur émergence, notamment des formulaires de candidature permettant aux personnes qui le souhaitent de déclarer qu’elles sont racisées ;
• mandate le Conseil Électoral National pour vérifier la conformité des listes municipales avec les différents quotas et les valider si elles sont conformes ou alors ne pas les valider et demander qu’un nouveau travail pour respecter le quota soit fait. Cette vérification de conformité s’appuiera uniquement sur la représentativité au global de la liste sans considérations personnelles au cas par cas.
• mandate le Conseil Fédéral pour mettre en place une échelle de sanctions financières pour les listes ne répondant pas aux critères de cette motion au travers notamment des reversements des élus tête de liste au parti.
• souhaite que des retours sur la représentation des diversités soient faits au Conseil fédéral à l’occasion de ses prochaines sessions,
La Conférence des régions du mouvement sera associée à ce suivi, en lien avec les délégué·e·s aux élections, la commission antiracisme et les secrétaires régionaux concernés.

Pour : beaucoup ; blancs : 7

Retour sur les motions adoptées par le Conseil fédéral
des Écologistes – EÉLV des 4 et 5 octobre 2025


Dans le cadre de la présente motion, l’expression « personne racisée » désigne une personne répondant à deux conditions cumulatives :

  • Autoidentification : elle se reconnaît comme appartenant à un groupe discriminé en raison de son origine réelle ou supposée, de sa couleur de peau, de son nom, de sa culture ou de son appartenance religieuse perçue.
  • Hétéro-identification : elle est perçue par la société comme issue d’une minorité ethnique ou d’une immigration extra-européenne (par exemple : Maghreb, Afrique subsaharienne, Asie, Outre-mer, Amérique latine) et peut, de ce fait, être confrontée à des inégalités ou à des discriminations systémiques dans l’accès aux droits, à l’emploi, à la politique ou dans la vie quotidienne.

Cette définition articule deux dimensions essentielles, largement étudiées par les sciences sociales : la manière dont une personne se définit elle-même (dimension subjective) et la manière dont elle est perçue et traitée par la société (dimension objective). Cette articulation reprend notamment les analyses de Colette Guillaumin sur la construction sociale de la race (« L’idéologie raciste », 1972) et de Stuart Hall sur l’assignation identitaire et la racialisation (1997).

En contexte français, cette définition prend une résonance particulière. Elle s’inscrit dans une histoire marquée par la colonisation, l’esclavage et leurs héritages contemporains, qui structurent encore aujourd’hui les rapports sociaux. Comme l’ont montré les travaux de Didier Fassin (La force de l’ordre, 2011) et de Pap Ndiaye (La condition noire, 2008), les discriminations raciales en France ne sont pas seulement des comportements individuels, mais des processus systémiques, qui affectent l’accès aux droits fondamentaux, aux ressources économiques et à la représentation politique.

Employer le terme « personne racisée » revient donc à reconnaître l’existence de rapports sociaux de race dans la société française, au sens où l’entend Françoise Vergès (Un féminisme décolonial, 2019) : des mécanismes de hiérarchisation et de domination qui assignent certains groupes à des positions subalternes. Il ne s’agit pas de naturaliser les différences, mais de nommer les rapports de pouvoir qui produisent et reproduisent les inégalités.

En ce sens, la notion de « personne racisée » permet de dépasser les explications individualisantes pour mettre en lumière les discriminations structurelles, validées par de nombreuses recherches (cf. Observatoire des inégalités ; Défenseur des droits, baromètre 2022). Elle constitue un outil conceptuel et politique pour penser et combattre la sous-représentation persistante des minorités dans les institutions, et notamment dans la vie politique locale et nationale.