Résumé
Les Haltes Soins Addiction (HSA), ouvertes à Paris et Strasbourg en 2016, permettent aux usagers de drogues de consommer dans un cadre médicalisé, réduisant overdoses, infections et nuisances publiques. Toutes les évaluations (Inserm, IGAS/IGA, Hospices Civils de Lyon) confirment leur efficacité sanitaire, sociale et économique : elles sauvent des vies, favorisent l’accès aux soins, limitent l’injection dans l’espace public et améliorent la tranquillité des quartiers. L’expérimentation s’achevant fin 2025, il est urgent de pérenniser et généraliser ces dispositifs en les inscrivant dans le droit commun.
Exposé des motifs
Les Haltes “Soins Addictions” (HSA) – sont des structures dites de “réduction des risques”, encadrées par du personnel médical spécifiquement qualifié qui permettent à certain·e·s de ces usager·e·s de drogues de les consommer hors de la voie publique dans des conditions moins précaires et donc moins à risques, par injection ou par inhalation.
Les Haltes “Soins Addictions” de Paris et Strasbourg ont été ouvertes en 2016, sous la dénomination initiale de “salles de consommation à moindre risque” dans un cadre expérimental défini par la loi de modernisation de notre système de santé. En 2022, cependant, l’expérimentation initiale a été prolongée au 31 décembre 2025 – soit à la fin de cette année.
Les HSA permettent d’accueillir les personnes usagères de drogues dans des conditions sécurisées et encadrées, afin d’éviter comorbidités, infections et surdoses mortelles. Elles ont prouvé leur efficacité. Tous les rapports d’évaluation sont unanimes : elles garantissent la tranquillité publique, améliorent l’accès aux soins, réduisent le risque d’overdose et sauvent des vies.
L’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) confirme les bénéfices majeurs de ces HSA : sur 10 ans, elles ont réduit de 69% les overdoses non fatales, de 6% les infections au VIH, de 11% celles liées à l’hépatite C, ainsi que de 77% des complications cutanées et de 71% des passages aux urgences. Elles limitent aussi les délits et l’injection dans l’espace public, comme en témoigne la division par trois des seringues retrouvées autour de la salle parisienne.
Au plan économique, elles évitent environ 11 millions d’euros de dépenses médicales en dix ans, avec un coût-efficacité jugé favorable. Au-delà des chiffres, elles améliorent la qualité de vie et la tranquillité publique.
Le rapport conjoint de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et de l’Inspection générale de l’administration (IGA), publié en décembre 2024, confirme l’efficacité des HSA dans la réduction des risques sanitaires et des nuisances publiques liées à la consommation de drogues. Depuis 2016, les deux sites existants ont encadré 550 000 injections, réduisant les risques de VIH et d’hépatite C. À Paris, les seringues abandonnées sont passées de 150 à moins de 10 par jour ; en 2023, 145 usagers ont été orientés vers des soins adaptés et des centaines de consultations ont eu lieu.
La HSA de Strasbourg joue un rôle de veille sanitaire, qui a permis d’alerter sur la hausse du mésusage du fentanyl. À Paris, la salle accueille un public très précaire (79 % sans-abri, 49 % sans couverture sociale). Ce rapport recommande l’intégration des HSA dans le droit commun pour permettre de nouvelles ouvertures et alerte sur les risques d’un abandon du dispositif.
Un autre rapport d’évaluation des HSA, réalisé par les Hospices Civils de Lyon, a été commandé par la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA) : il confirme leur rôle essentiel dans les parcours de santé de personnes en grande précarité. Ces structures, fondées sur un cadre souple et non jugeant, favorisent l’émergence d’une demande de soins et permettent d’initier des parcours adaptés aux réalités des usagers. Elles proposent des soins de première intention, un accompagnement vers les droits et l’hébergement, ainsi qu’un soutien psychologique et, si nécessaire, une orientation psychiatrique, tout en améliorant la tranquillité publique autour des sites.
En Europe, plus d’une centaine de salles de consommation supervisée existent, dont 14 en Suisse, 32 en Allemagne, 26 aux Pays-Bas et 16 en Espagne. La France reste à la traîne avec deux HSA et ce retard français est d’autant plus frappant que, dans les autres pays, ces dispositifs ne sont même plus un sujet de débat puisque intégrés dans les politiques de santé publique car reconnus pour leur efficacité.
Le silence de l’État sur les bénéfices de ces dispositifs et son inaction quant à son déploiement sur le territoire est inacceptable. L’inaction annihile des années de progrès en matière de réduction des risques et de prise en charge des populations vulnérables. Il est grand temps de replacer la santé au cœur de nos priorités et de dépasser la désinformation et des discours idéologiques fondés sur de la panique morale qui ne font qu’entraver l’accès aux soins. L’approche répressive nous a détourné des véritables enjeux : la santé publique, la réduction des risques et des dommages, la véritable prévention et la réinsertion sociale.
À quelques mois de l’échéance de l’expérimentation, aucune mesure n’a été prise pour intégrer ces structures dans le droit commun. Pire encore, elles sont la cible de discours ignorants et stigmatisants de la part de certains membres du gouvernement. L’absence de décision sur leur pérennisation met en péril ces structures et les centaines de personnes qu’elles accompagnent chaque jour à Paris et à Strasbourg.
Motion
C’est la raison pour laquelle, Les Écologistes appellent à :
• Pérenniser le dispositif des Haltes Soins Addictions (HSA) en l’intégrant dans le droit commun, dès le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2026, afin de :
- Sauvegarder et défendre les HSA existantes de Paris et Strasbourg, qui ont fait la preuve de leur efficacité tant sur le plan sanitaire que pour la tranquillité publique.
- Développer et ouvrir de nouvelles HSA partout où elles sont nécessaires, en permettant aux CAARUD et aux CSAPA d’obtenir des extensions d’autorisation. Les structures doivent recevoir des moyens suffisants pour accueillir les usager·e·s dans de bonnes conditions. L’objectif est de construire un réseau de lieux de consommation et de repos à moindre risque, de taille plus réduite mais plus nombreux, afin de répondre aux besoins réels tout en rassurant les riverain·e·s.
- Développer des HSA mobiles, notamment dans les territoires dépourvus de structures spécialisées (CAARUD, CSAPA).
- Soutenir un financement pérenne et suffisant des HSA, assuré par l’État et les collectivités, permettant un maillage territorial adapté, le recrutement de personnels qualifiés et la coordination avec les dispositifs sanitaires et sociaux existants.
- Soutenir les contentieux engagés par Médecins du Monde, notamment au niveau national et à Marseille, afin de faire reconnaître la responsabilité de l’État dans l’obstruction à la mise en place de nouvelles Haltes Soins Addictions
- Favoriser l’accès au logement et la réinsertion sociale pour les personnes accompagnées par les HSA, car sortir durablement de l’addiction suppose des conditions de vie dignes, stables et sécurisées.
- Réaffirmer que la réduction des risques et des dommages est une politique de santé publique efficace, pragmatique, humaine et nécessaire, et que les Haltes Soins Addictions doivent en constituer un des piliers.
Unanimité pour
Synthèse des positions antérieures du parti
Motions votées au Congrès et Conseil fédéral :
Avril 2014 : De la pénalisation de l’usage du cannabis à sa légalisation
Janvier 2022 : Légalisation, dépénalisation : pour une politique des drogues sanitaire et sociale, garante de l’ordre public
Juin 2025 : Face au chemsex, urgence d’une réponse sanitaire, communautaire et non-répressive
Retour sur les motions adoptées par le Conseil fédéral
des Écologistes – EÉLV des 4 et 5 octobre 2025