NB concernant la référence du titre de la motion au territoire hexagonal : Bien que la majorité des orientations programmatiques défendues par cette motion s’appliquent au territoire français dans sa totalité, les zones non interconnectées (ZNI) au réseau électrique hexagonal continental (Corse et Outre-Mers) connaissent des spécificités qui n’ont pas pu être abordées.
Précisions lexicales concernant les termes utilisés dans cette motion :
- – Photovoltaïque au sol : installation de panneaux photovoltaïques sur des structures légères directement implantées sur le sol
- – Ombrière photovoltaïque : structure visant à fournir de l’ombre, composée d’une surface horizontale ou oblique en hauteur, revêtue d’une installation photovoltaïque, ainsi que d’ancrages au sol.
- – Agrivoltaïsme : situation particulière de synergie agronomique entre production électrique et production agricole. C’est un cas particulier de photovoltaïque au sol qui est défini en détail dans le corps de la motion
- – Espaces délaissés : dans cette motion, les « espaces délaissés » sont entendus comme les friches artificialisés à l’exception des friches agricoles (donc les friches militaires, industrielles, administratives, ferroviaires, portuaires…) auxquels sont ajoutés les espaces sans affectation en bordure d’infrastructures de transport
- – Espace artificialisé : espace dans lequel le sol a connu une altération durable de tout ou partie de ses fonctions écologiques, en particulier de ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques, ainsi que de son potentiel agronomique par son occupation ou son usage, sans usage agricole actuel
Exposé des motifs
Mettre un terme aux errements de la politique énergétique nationale
La crise énergétique, consécutive à la guerre d’agression russe en Ukraine et à l’indisponibilité massive du parc nucléaire, est venue rappeler à la France son extrême dépendance aux combustibles fossiles et à un parc électronucléaire vieillissant. Les ruptures d’approvisionnement ont fait s’envoler les prix et ont précarisé massivement les ménages et certaines entreprises du pays.
Face à ce constat, le chemin à parcourir semble tout tracé : davantage de sobriété, d’efficacité et de renouvelables. Autrement dit, réduire la demande d’énergie et pourvoir la portion restante uniquement à l’aide de sources qui ne soient ni fossiles ni fissiles. Cette voie ne semble pas celle qu’entend suivre le gouvernement qui a démontré toute son ambiguïté en matière de politique énergétique. La session parlementaire 2022-2023 aura vu passer deux textes agissant sur la production d’énergie. D’abord, la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, sur laquelle notre groupe à l’Assemblée nationale s’est abstenu en raison de son manque criant d’ambition et de risques d’atteinte à la protection de la biodiversité – le reste de la motion reviendra brièvement sur les évolutions apportées par le texte. Ensuite, un texte d’accélération du nucléaire, adopté par le Parlement au mois de mai 2023, sur lesquels l’opposition écologiste est vive. Le texte prévoit en effet d’inverser la trajectoire de diminution progressive du nombre de réacteurs mais aussi de fragiliser dangereusement le droit de l’environnement qui encadre actuellement les installations nucléaires, abimant d’autant l’édifice de la sûreté nucléaire nationale. Enfin, l’offensive gouvernementale a lieu également au niveau européen où la France a obtenu l’intégration du nucléaire dans la taxonomie des investissements verts et bloque les textes relatifs aux renouvelables pour faire avancer son agenda pronucléaire.
La nécessité d’une rupture de modèle énergétique
Alors que le gouvernement et ses alliés de droite et d’extrême-droite comptent nous enfermer dans une nouvelle dépendance à l’atome, il semble nécessaire de rappeler comment nous, nous envisageons le futur énergétique français.
D’abord, faut-il le rappeler, sortir de notre état d’ébriété énergétique en réduisant drastiquement nos besoins de services énergétiques par la sobriété[1]. Cette sobriété volontaire, planifiée politiquement, couplée à des mesures massives d’efficacité énergétique, doit nous permettre de réduire nos consommations d’au moins la moitié, si ce n’est les deux tiers, de ce qu’elle représente actuellement, d’ici 2050. Un réel défi qui suppose d’embarquer l’ensemble du corps social hors du modèle consumériste marchand.
Ensuite, changer nos sources de production d’énergie pour sortir des fossiles et fissiles qui nuisent à l’habitabilité des écosystèmes, entraînant dérèglement climatique ou générant des déchets radioactifs à stocker pour des centaines de milliers d’années. L’urgence de lancer une rupture énergétique, bien plus qu’une transition énergétique, se fait de plus en plus pressante et il est de la responsabilité des écologistes de dresser le programme politique qui nous mènera vers un mix 100% renouvelable fondé sur la sobriété. Il nous faut, pour cela, nous doter d’orientations claires concernant le déploiement de nouvelles installations de production d’énergie renouvelable.
Le solaire photovoltaïque : une source d’énergie pertinente pour répondre à l’urgence de la transition énergétique
La présente motion traite spécifiquement d’une filière, le photovoltaïque (PV), qui emporte de nombreux enjeux sur lesquels il convient de se positionner clairement.
Évidemment, comme tout mode de production d’énergie, le photovoltaïque a des impacts sur l’environnement que nous reconnaissons, loin de toute forme de déni ou d’angélisme. Il n’est pas neutre en carbone, n’a pas un impact zéro sur la biodiversité et nécessite l’extraction de ressources présentes en quantité parfois limitée sur notre planète. En réalité, aucune source d’énergie n’est parfaitement exemplaire au sens des trois critères précédents. Le PV représente simplement une des solutions les moins impactantes pour s’approvisionner en électricité. Son taux de recyclage est de 95% de la masse des panneaux qui ont une durée de vie minimale d’une trentaine d’années, le tout avec un bilan carbone de 43,9 gCO2eq/kWh qui tomberait à 25,2 gCO2eq/kWh si les panneaux étaient fabriqués en France[2]. Les dernières valeurs sont à comparer aux bilans carbones des autres sources d’énergie, comme le charbon par exemple avec 820 gCO2eq/kWh, mais surtout aux 59,9 gCO2eq/kWh du mix électrique français.
De plus, on observe déjà une augmentation continue du rendement des panneaux, une diminution de la masse des matériaux utilisés et donc une amélioration sensible du bilan carbone et matière.
Sur le plan économique, la filière a connu une diminution spectaculaire du coût moyen complet de production d’un mégawattheure (LCOE) [3] :
- Pour les centrales sur toiture résidentielle de 3 kWc : 314 à 594 €/MWh en 2011, 155 à 283 €/MWh en 2020
- Pour les centrales sur grandes toitures et ombrières : 342 à 540 €/MWh en 2011, 72 à 113 €/MWh en 2020 et, en prévision, 25 à 38 €/MWh en 2048
- Pour les centrales au sol : 241 à 439 €/MWh en 2011, 49 à 88 €/MWh en 2020 et, en prévision, 23 à 32 €/MWh en 2050
Ces chiffres sont à comparer au coût du MWh produit par l’EPR de Flamanville qui serait compris entre 110 et 120 euros/MWh[4].
Le solaire photovoltaïque est donc bien une énergie pertinente dans la lutte contre le changement climatique et pour la sortie du nucléaire. C’est également la ressource énergétique la plus répartie dans le pays qui favorise au mieux l’autonomie énergétique individuelle et des territoires. Malheureusement elle est encore trop faiblement déployée à l’échelle nationale.
Un déploiement marginal à accélérer
En 2020, la production d’énergie solaire photovoltaïque ne s’élevait qu’à 13,6 TWh[5] sur les 2651 consommés dans le pays[6] soit 0,51%, pour une part totale des renouvelables dans le mix énergétique de 13,1%. Si la hausse des capacités photovoltaïques installées en 2022 atteignait 17%, soit 2,84 GWc de puissance installée[7], cette hausse sera bien insuffisante pour atteindre les valeurs fixées par la programmation énergétique. Ainsi, la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) pour la France métropolitaine continentale prévoit 20,1 GW au 31 décembre 2023 contre 15,63 GW installés au 31 décembre 2022. Tout juste est-il encore possible d’espérer atteindre les capacités de production d’électricité photovoltaïque prévues pour la fin 2028 : entre 35,1 et 44 GW. Ci-dessous, un graphique illustrant le saut quantitatif qu’il reste à opérer.
source : Statinfo – solaire photovoltaïque
Au-delà de ces échéances, l’horizon généralement retenu pour penser le déploiement des énergies renouvelables, donc du solaire, se révèle être 2050. C’est la date sur laquelle s’arrêtent les scénarios prospectifs sans nucléaire, présentés à l’automne 2021, permettant de modéliser les voies possibles à long-terme pour la France en matière d’énergie. Les publications du gestionnaire du Réseau de Transport d’électricité (RTE), de l’ADEME et de l’association Négawatt font toutes état du besoin de poser plus de panneaux solaires. L’état du parc solaire, même couplé à d’autres sources d’énergies (éoliennes, géothermie, biomasse…), sera insuffisant pour couvrir nos besoins futurs, aussi sobres soient-ils. Les trois scénarios proposent des valeurs chiffrées concernant la puissance totale à installer :
- 143 GWc pour l’association Négawatt[8] qui laisse la part la plus importante à la sobriété, tablant sur la division par trois de la consommation d’énergie primaire au mitan du siècle ;
- 208 GWc pour RTE pour le scénario prévoyant une sortie du nucléaire en 2050[9] ;
- 92 GWc à 144 GWc pour l’ADEME, en fonction du niveau de consommation prévus par chacune des quatre modélisations[10].
Le constat est donc clair : même dans le cadre d’un modèle socio-économique profondément renouvelé et articulé autour de la notion de sobriété, il faudra poser du solaire. La question qui se pose donc est “où et comment déployer ces panneaux photovoltaïques ?”
Le photovoltaïque sur bâtiments, une priorité réclamant le complément des centrales au sol à moyen-terme pour tenir les objectifs de déploiement écologistes
La priorité politique des écologistes, rappelée par nos parlementaires lors de l’examen du projet de loi d’accélération des EnR, est le déploiement de centrales solaires sur bâtiment, à l’impact écologique le plus limité. Cette catégorie se compose quasi exclusivement de solaire sur toiture, et, à la marge, sous conditions d’exposition solaire, de photovoltaïque mural. Cette dernière technique peut notamment présenter un intérêt pour la production électrique hivernale.
Malheureusement, les mauvais choix politiques de certaines majorités n’ont pas permis à la filière de connaître l’essor qui aurait dû être le sien. Le moratoire de 2010 sur l’obligation d’achat de l’électricité produite par les centrales solaires en toiture a ainsi donné un coup d’arrêt majeur au secteur que les exécutifs suivants n’ont pas su réparer. Aujourd’hui encore, les installations sur toitures souffrent de nombreuses contraintes techniques et administratives qui expliquent leur faible rythme de déploiement. Elles ont trait notamment au raccordement au réseau de distribution d’électricité qui n’est pas forcément adapté pour accueillir massivement de nouveaux points d’injection ce qui occasionne des devis de raccordement chers aux chiffrages parfois obscurs, et ce surtout en zone rurale ; la vision encore trop souvent restrictive des Architectes des Bâtiments de France ; l’inadaptation des charpentes à recevoir la charge supplémentaire représentée par les panneaux solaires ; le manque de main d’œuvre formée…
Bien que la technologie des panneaux progresse, les chiffres de déploiement du solaire en toiture traduisent des difficultés : si elles comptent pour 98% des installations photovoltaïques raccordées en 2021, elles représentent seulement le tiers des nouvelles capacités. Les 0,927 GWc installés annuellement en toiture[11] sont à mettre en regard avec le rythme annuel d’installation avancé par les différents scénarios. Pour atteindre les capacités prévues par son scénario en 2050, Négawatt prévoit l’installation d’environ 3 GWc annuels de capacités photovoltaïques puis de 5 à 6 GWc par an à partir de 2031[12]. L’ADEME anticipe, elle, 2 GWc par an entre 2020 et 2030 puis 3 GWc annuels entre 2030 et 2050. Pour le scénario sobriété de RTE, c’est 6 GWc annuels qu’il faut installer sur la période 2020-2050[13].
Tirant les conséquences de cet écart quantitatif entre objectifs d’installation et capacités des centrales sur toitures à les atteindre même avec de profondes évolutions réglementaires, les trois rapports de référence préalablement cités proposent tous une proportion substantielle de solaire au sol à installer d’ici 2050. “Tenant compte de l’historique récent et de la dynamique propre à [chaque] famille [de projets] considérée”, Négawatt prévoit 54 GWc de parcs au sol et 12 GWc d’ombrières de parking en 2050 quand l’ADEME en prévoit 36 GWc.
La deuxième conséquence principale de l’ajustement bien trop tardif du soutien public à la filière est son prix qui, sans massification du marché, reste élevé. Le solaire en petite toiture coûte ainsi deux à trois fois plus cher que le solaire au sol. A titre d’exemple, le tarif d’achat pour les centrales de moins de 3 kWc (maisons individuelles), directement financé par l’Etat, est près de 50 % supérieur au coût du nouveau nucléaire. Le solaire sur grandes toitures et ombrières sur parkings présente un coût plus faible, 72 à 113 €/MWh en fonction de l’ensoleillement, contre 49 à 88 €/MWh pour les centrales au sol. Par ailleurs, l’ADEME prévoit une baisse du coût de production de ces deux formes de photovoltaïques à horizon 2050 : 25-38 €/MWh pour les grandes toitures et 23-32 €/MWh pour les centrales au sol soit un écart de 13 à 15 % (projections issues de l’étude 2019, cf [2]). Focaliser notre action de court terme uniquement sur le solaire sur petite toiture mettrait à mal notre argument pointant les coûts très élevés du nucléaire. Axer notre politique photovoltaïque sur un mix de surface privilégiant les installations sur bâtiments et parkings pour protéger les espaces naturels, agricoles et forestiers, implique une augmentation des charges publiques qu’il s’agit d’assumer en visant préférentiellement le développement des grandes centrales sur toiture.
On l’aura compris, il est nécessaire de favoriser résolument la solarisation du bâti. Le déploiement du photovoltaïque au sol peut, à court et moyen terme, permettre d’augmenter la puissance installée et de combler le déficit d’installation en toiture pour tenir le rythme nous emmenant au 100% renouvelables en 2050, ce qui implique une multiplication par treize de la production d’électricité solaire photovoltaïque entre 2020 et 2050, selon le scénario Négawatt. En attendant les effets d’une politique de soutien massif à la filière toiture en parallèle du renforcement des obligations de couverture des bâtiments, que nous appelons de nos vœux, le déploiement du solaire au sol apparaît nécessaire. Il doit se faire selon des lignes claires afin de protéger les espaces naturels, agricoles et forestiers.
Cependant, depuis quelques années, les centrales solaires sur sol agricole se multiplient sans encadrement suffisant. Si certaines présentent une vraie synergie avec l’agriculture, des projets usent de l’argument d’une fausse complémentarité avec l’agriculture pour s’implanter sur des espaces agricoles et produire à moindre coût. Cette situation porte atteinte à l’accès au foncier agricole pour des paysan·ne·s et nuit à l’acceptabilité sociale du photovoltaïque. Afin de protéger les sols agricoles, les installations qui ne relèvent pas de l’agrivoltaïsme, synergie entre activités agricole et énergétique comme définie dans cette motion, ne doivent pas être autorisées.
Le sens de cette motion est donc de définir des modalités de déploiement des installations solaires photovoltaïques pour en minimiser l’impact environnemental tout en maximisant l’intérêt collectif. Cette motion a également pour objet de déterminer un cadre afin d’aider les élu·e·s et les militant·e·s dans leur prise de décision puisqu’EÉLV considère que l’examen des projets de centrales photovoltaïques doit se faire au cas par cas. ;
Poser du solaire au sol : avec mesure, méthode et d’abord sur les parkings et les zones artificialisées délaissées
Contrairement au photovoltaïque sur bâtiment, dont l’installation s’appuie sur un bâtiment préexistant, le solaire au sol doit, par définition, être positionné sur le sol. Pour chaque mégawatt disponible (correspondant à une production pouvant fournir la demande de 300 à 800 habitants selon le contexte local) il faut mobiliser un hectare. Tout cela, sachant que la moitié de la superficie considérée n’est pas occupée par des capteurs[14].
Si l’on traduit l’intégralité des besoins en photovoltaïque au sol identifiés par Négawatt pour 2050, on arriverait à 540 km² occupés soit moins de 0,1 % du territoire. Encore une fois, il est nécessaire de mettre ces chiffres en relation avec d’autres données comme celles relatives à l’artificialisation des sols, entre 200 à 300 km² chaque année selon France Stratégie [15], 560 km² selon Agreste [16], ou aux agrocarburants qui mobilisent 800 000 hectares soit environ 3% de la surface agricole utile ou 1,5% de la superficie nationale [17].
Évidemment, les écologistes soutiennent prioritairement l’accélération de l’installation de panneaux solaires sur les zones artificialisées délaissées. Une étude de l’ADEME datée de 2019 était plutôt optimiste puisqu’elle évaluait le potentiel à 53 GWc, assez pour couvrir les besoins de capacité photovoltaïque au sol identifiés par le scénario Négawatt pour 2050. Cependant, la ministre de la transition écologique est venue doucher ces espoirs au mois de novembre 2021 en annonçant que le gisement réellement exploitable à moyen terme n’atteignait que 7 GWc. Elle fait là référence à une seconde étude ADEME, non encore publiée à ce jour, qui n’avait pas pour objectif de recenser toutes les friches pouvant hypothétiquement accueillir des centrales au sol mais une sélection de sites présentant des conditions considérées dès maintenant comme favorables, y compris par les services de l’Etat, en termes environnementaux, techniques et économiques. Seuls les sites les plus adéquats à moyen terme voire court terme ont donc passé l’épreuve de sélection opérée par l’agence et les services.
La réalité du potentiel des zones artificialisées délaissées à long terme se trouve quelque part entre les deux valeurs proposées par l’ADEME. La première est sans doute surestimée car n’ayant pas été corroborée par des validations spécifiques in situ, la seconde largement sous-estimée car ne correspondant pas à une étude de potentiel mais à un filtrage de projets rapidement activables. Au-delà de la faisabilité technico-économique du déploiement du solaire au sol sur zones artificialisées délaissées, il faut se poser la question de la pertinence de son installation. En effet, certaines friches présentent une grande qualité en termes de biodiversité, remarquable mais aussi ordinaire, l’absence d’activité humaine ayant laissé s’installer de nombreuses espèces.
Ce qui est certain c’est qu’avant d’aller sur les friches, les ombrières photovoltaïques sur parcs de stationnement sont la priorité lorsqu’il s’agit de poser des panneaux au sol. Il n’est malheureusement pas possible pour l’heure d’évaluer précisément le potentiel de l’ensemble des surfaces de ces parcs de stationnement qui ne permettront pas, dans tous les cas, d’atteindre les objectifs d’installation du PV requis en 2050. On peut tout de même se féliciter que la loi d’accélération des EnR prévoit une obligation d’équipement des parkings extérieurs existants de plus de 1500 m² en ombrières permettant la production d’EnR avec cependant des critères dérogatoires encore bien trop lâches. Par ailleurs, les friches commerciales, plus récentes et donc moins susceptibles d’avoir été recolonisées par la biodiversité en raison d’une longue période d’abandon, peuvent constituer un potentiel conséquent à mobiliser, selon leur cohérence avec les projets urbains.
Si les politiques publiques doivent permettre le développement accéléré de la production photovoltaïque sur bâtiments, cela ne sera assurément pas suffisant pour tenir les délais d’installation de solaire permettant d’arriver au mix 100% renouvelable en 2050 et, ainsi, réaliser la transition que nous appelons de nos vœux depuis des décennies. Cela implique, de fait, de devoir installer des panneaux photovoltaïques au sol. Cet état de fait ne doit, en aucune façon, nous dispenser de la préservation des espaces agricoles. Le développement du photovoltaïque devra être encadré strictement car il porte des effets sur l’environnement et pourrait avoir des impacts délétères sur les dynamiques foncières et agricoles.
Tolérer les parcs sur espaces agricoles sous strictes conditions en s’appuyant sur le renforcement du nouveau cadre légal relatif à l’agrivoltaïsme
Jusqu’à récemment, le cadre juridique applicable aux projets photovoltaïques au sol sur espaces agricoles était fragile, reposant largement sur la jurisprudence administrative. Des projets alibi annonçant une compatibilité avec l’activité agricole, favorable à l’exploitation, en dépit de l’absence de viabilité agronomique pouvaient prospérer.
La loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables mettra fin à ce manque de régulation si les décrets attendus sont à la hauteur. Malgré ses manques sur de nombreux autres points, le texte a le mérite de mettre fin à un flou juridique particulièrement dommageable pour le monde agricole puisqu’aucune disposition législative n’encadrait spécifiquement le photovoltaïque au sol sur terres agricoles ou l’agrivoltaïsme, notion qui désigne des modules photovoltaïques “situés sur une parcelle agricole où ils contribuent durablement à l’installation, au maintien ou au développement d’une production agricole” (ex : par la protection contre la grêle et le gel, apport d’ombre…). L’agrivoltaïsme est une forme particulière de photovoltaïque au sol sur espaces agricoles qui présente des intérêts agronomiques particuliers. L’article 54 dresse ainsi les critères de définition cumulatifs suivants pour caractériser une installation agrivoltaïque :
- Production agricole significative
- Revenu agricole durable issu de cette production
- Apport d’un des services suivants à la parcelle, sans que l’installation porte une atteinte substantielle à l’un desdits services :
- Amélioration du potentiel et de l’impact agronomique
- Adaptation au changement climatique
- Protection contre les aléas
- Amélioration du bien-être animal
- Enfin, l’article ajoute deux éléments de définition négatifs. En clair ne relève pas de l’agrivoltaïsme une installation qui :
- Ne permet pas à la production agricole d’être l’activité principale de la parcelle agricole, qui s’apprécie au regard du volume de production, du niveau de revenu ou de l’emprise au sol.
- N’est pas réversible.
Surtout, dorénavant, le photovoltaïque au sol sur espaces agricoles ne relevant pas de l’agrivoltaïsme, nouvellement défini par la loi et dont il faut bien le distinguer, pourra s’installer uniquement sur des sols incultes ou en friche, depuis une durée à définir par décret. Les installations devront rester compatibles avec une activité agricole, sans que les conditions de cette compatibilité soient précisées à ce jour, et ne pourront être identifiées que par un document-cadre préfectoral proposé par la chambre d’agriculture locale. Par ailleurs, les autorisations d’urbanisme pour le solaire au sol ne seront plus délivrées que pour une durée limitée, sous conditions de démantèlement et garanties de réversibilité. De plus, “le propriétaire du terrain d’assiette est tenu d’enlever dans un délai raisonnable l’ouvrage et de remettre en état le terrain” lorsque l’activité énergétique n’est plus compatible avec l’activité agricole. Cependant, cette disposition porte un risque fort de rétention du foncier et de spéculation foncière. En effet, les prix de location proposés par les énergéticiens sont sans commune mesure avec les prix de fermage agricole : 3000 à 5000 €/ha (jusqu’à 10 000 €/ha pour les parcelles les plus ensoleillées) contre moins de 200 €/ha pour un fermage agricole de parcelles de polyculture. Dans ces conditions, aucun propriétaire n’a intérêt à favoriser l’agriculture et, dans le même temps, aucun·e paysan.ne ne peut payer de tels montants.
Le développement du photovoltaïque sur sols agricoles (hors agrivoltaïsme tel que défini précédemment) porte également un risque de perturbation temporaire des fonctions écologiques des sols. En effet, même en prenant en compte les dispositions légales (durée limitée, obligation de démantèlement et garantie de réversibilité), l’installation de panneaux photovoltaïques entraîne une modification des fonctions écologiques des sols (infiltrations d’eau transformées, moindre afflux lumineux au sol, couvert végétal maintenu ras par l’exploitant…).
Considérant ces contraintes, le photovoltaïque au sol sur espaces agricoles, naturels non-artificialisés (cf définition des espaces délaissés) ou forestiers, hors cas d’agrivoltaïsme tel que défini dans la loi, devrait être interdit.
En définitive, la légèreté technique du photovoltaïque au sol, posé sur de simples pieux sans fondations béton, nous permet d’affirmer son aspect démontable donc provisoire, en attendant l’exploitation complète du gisement en toiture.
Cette motion a vocation à synthétiser nos propositions pour un déploiement juste et équitable du photovoltaïque et à servir de grille de lecture aux militant·e·s confronté·e·s localement à des projets de centrales. Elle tient compte de considérations foncières, économiques, sociales, agronomiques, écologiques, de biodiversité et techniques.
Motion
Orientations programmatiques
Le Conseil fédéral d’Europe Écologie-Les Vert·e·s, réuni le 2 juillet 2023, adopte les orientations programmatiques suivantes :
- Mieux planifier le déploiement des installations solaires photovoltaïques pour en minimiser l’impact environnemental et social
Sur la base des chiffrages de capacités de production solaire à installer pour obtenir un mix 100% renouvelables en 2050 selon un scénario de sobriété, des diminutions de capacités consécutives à la fermeture progressive des centrales nucléaires en fin de vie, des évolutions réglementaires passées et à venir en matière de solaire photovoltaïque, et de l’état économique plus global de la filière du développement de projets photovoltaïques, instaurer des objectifs pluriannuels de capacités installées à chaque filière : la priorité ira au photovoltaïque sur bâtiment, puis au photovoltaïque sur ombrières, enfin, au photovoltaïque au sol sur espaces artificialisés délaissés. Le déclenchement des séquences d’appels d’offres publics tiendra compte de cette clé de priorisation
Les objectifs doivent s’inscrire dans une planification plus globale de sobriété énergétique et d’adaptation du réseau au 100% énergies renouvelables.
- → Protéger les espaces naturels, agricoles et forestiers et encadrer l’agrivoltaïsme
L’installation de panneaux photovoltaïques au sol sur espaces naturels non-artificialisés, agricoles et forestiers doit être interdite de manière générale pour protéger ces espaces de la perturbation écologique en laquelle consiste le déploiement de centrales solaires. Les installations sur bâtiments, y compris bâtiments agricoles, ne sont pas incluses dans cette interdiction.
Sur ces espaces, seules les installations qui relèvent de l’agrivoltaïsme, c’est-à-dire d’une synergie prouvée entre production énergétique et production agricole et au bénéfice de cette dernière, pourront être autorisées à condition de respecter les critères définis ci-dessous.
Les installations de panneaux photovoltaïques sur friches agricoles ne relevant pas de l’agrivoltaïsme seront interdites car ces espaces, bien que non utilisés au moment où ils sont considérés comme friches conservent une vocation agricole et alimentaire. Elles présentent des fonctionnalités écologiques que l’installation de panneaux photovoltaïques altérera. Seules les installations sur espaces artificialisés délaissés (friches minières, industrielles, commerciales…) pourront être autorisées, sous réserve du respect des procédures réglementaires existantes incluant une étude d’impact environnemental .
- → Améliorer la planification des implantations de centrales solaires :
● Afin de répartir « l’effort » d’accueil du photovoltaïque entre tous les territoires français, les objectifs régionaux de développement des énergies renouvelables prévus à l’article L141-5-1 du code de l’énergie détaillent finement les types d’installations photovoltaïques à réaliser (toitures, ombrières, PV au sol sur friches artificialisées et délaissées, agrivoltaïsme tel que défini dans la motion) en prenant en compte les caractéristiques bio-géophysiques et socio-économiques du territoire. Ils prévoient des mesures à mettre en œuvre pour accroître la part du solaire en toiture à chaque renouvellement desdits objectifs régionaux.
● Ces objectifs régionaux deviennent contraignants pour les conseils régionaux dès lors que ceux-ci bénéficient, comme prévu plus bas, de la régionalisation de la compétence du soutien public aux énergies renouvelables. Un système de bonus-malus, prenant notamment en compte le niveau de priorisation du solaire en toiture, des ombrières ou des centrales sur espaces artificialisés délaissés, permettrait de récompenser ou de sanctionner l’action des collectivités.
● En application du principe de subsidiarité et toujours pour répondre à l’objectif de répartition de l’effort, les objectifs régionaux de développement des énergies renouvelables sont déclinés à la maille intercommunale par la concertation entre conseils régionaux et assemblées délibérantes des EPCI, dans le respect d’un principe de solidarité réciproque entre villes et campagnes.
● Pour faciliter l’atteinte de ces objectifs, instaurer une planification photovoltaïque intercommunale obligatoire déclinant les objectifs d’installation assignés au territoire. Cette planification permettrait de déterminer précisément les gisements fonciers exploitables et les zones d’exclusion, tant pour les toitures que pour les centrales au sol. Un cadastre du potentiel solaire ainsi qu’un cadastre du réseau électrique, identifiant les possibilités de raccordement et planifiant les besoins futurs, devraient obligatoirement être annexés à ce document, de même qu’un relevé des sites et sols pollués pouvant accueillir une centrale ainsi qu’un relevé des zones de compensation mobilisables pour l’application de la séquence ERC.
● Contrairement aux zones d’accélération prévues par la loi d’accélération des énergies renouvelables, les zones de gisement seraient identifiées au niveau intercommunal et les services de l’Etat reprendraient la main si le gisement identifié s’avérait insuffisant pour atteindre les objectifs déclinés à la maille intercommunale évoqués plus haut. Surtout, ces zones ne bénéficieraient pas de simplification dans l’application du droit de l’environnement.
● Cette territorialisation des objectifs et de la planification afférente doit s’accompagner d’une territorialisation accrue du soutien public au solaire par la régionalisation du niveau du tarif d’achat et des appels d’offres de la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) dont la compétence est attribuée aux conseils régionaux, d’une levée des restrictions à l’investissement des collectivités prévues par le Code Général des Collectivités Territoriales, mais également d’une stratégie de lutte contre la spéculation foncière (cf bloc de propositions infra).
● Baisser le coefficient du critère prix dans la notation des candidatures aux appels d’offres CRE pour donner plus de poids au critère environnemental. Malgré l’absence de soutien public,les projets dont la production est valorisée en contrat d’achat de gré-à-gré (PPA) ne pourront pas s’exonérer des obligations mentionnées dans le présent texte.
- Favoriser le solaire photovoltaïque sur bâtiment pour limiter les besoins de construction d’installations au sol
● Réaliser une simplification réglementaire profonde concernant le solaire sur bâtiment (assouplissement des conditions de raccordement, éventuelle opposition de l’architecte des bâtiments de France soumise à un encadrement par décret, etc.) pour permettre une vraie accélération du déploiement du PV afin de tenir les objectifs permettant d’atteindre un mix 100% renouvelables en 2050.
● Régionaliser le niveau du tarif d’achat de l’électricité produite par des centrales sur bâtiments et ombrières. De même, régionaliser les appels d’offres de la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) pour les centrales sur bâtiment >500 kWc.
● Encourager la conclusion de contrats d’achat de gré-à-gré (PPA) par les personnes publiques pour l’électricité produite par des centrales sur bâtiment notamment en allégeant la fiscalité afférente et en simplifiant le cadre réglementaire.
● Rendre obligatoire, sous conditions techniques, l’installation de panneaux solaires sur tous les bâtiments publics et privés nouveaux ou lourdement rénovés, peu importe leur emprise foncière, et, progressivement, obligation de couverture solaire des bâtiments existants n’en comportant pas sous conditions techniques favorables validées par un diagnostic obligatoire. D’ici à 2030, tout propriétaire non-résidentiel devra avoir réalisé les installations nécessaires, qu’il y ait transaction immobilière ou non. Cette politique visera prioritairement les bâtiments de grande superficie puis s’élargira progressivement aux bâtiments de moindre emprise. Pour ce qui est des bâtiments résidentiels existants, coupler à des dispositifs d’accompagnement financier et technique, en particulier pour les ménages les plus précaires, l’instauration d’une obligation de couverture progressive.
● Renforcer l’obligation d’équipement des parcs de stationnement extérieurs existants en ombrières photovoltaïques, prévue par la loi d’accélération des EnR, en abaissant le seuil d’application aujourd’hui à 1500 m², en augmentant le montant des sanctions pécuniaires et en limitant les conditions d’exemption possibles.
● Recruter des personnels administratifs supplémentaires pour réduire les délais maximums d’instruction des dossiers de centrales solaires par les services de l’Etat. Cette proposition vaut tant pour les centrales sur bâtiment que pour les centrales au sol lorsqu’elles doivent être construites.
● Effectuer une évaluation de l’instauration, prévue par la loi d’accélération des EnR, d’un référent préfectoral à l’instruction des projets de développement d’énergies renouvelables et des projets industriels nécessaires à la transition énergétique. Seront évalués : l’existence d’un nombre suffisantde personnels formés et dédiés, chacun dans leur discipline, à l’instruction des dossiers, l’absence de dégradation de la qualité des études environnementales, le respect des garanties d’indépendance prévues par le droit.
● Encourager le soutien financier des collectivités territoriales à la réalisation des études techniques préalables à l’installation de centrales solaires sur bâtiments par des communautés d’énergie renouvelable et des communautés énergétiques citoyennes.
● Proscrire la construction de bâtiments agricoles, industriels ou commerciaux équipés de panneaux photovoltaïques surdimensionnés par rapport à leur fonction première.
● Favoriser l’installation de panneaux bi-modes thermiques/photovoltaïques permettant également la récupération de chaleur
- Réserver et encadrer encore davantage l’implantation des centrales au sol sur espaces artificialisés délaissés
● N’autoriser que le déploiement du photovoltaïque au sol sur les sites artificialisés délaissés (hors agrivoltaïsme) et, sous réserve de compatibilité sanitaire dans le cas de sites pollués, y favoriser la multifonctionnalité des centrales en privilégiant l’installation d’activités agricoles.
● Proscrire par principe les défrichements de toute forêt ou haie pour la réalisation d’installations photovoltaïques. Par exception, uniquement dans la limite de 10% de l’emprise des installations photovoltaïques, et dans l’objectif de favoriser la biodiversité par l’ouverture des milieux, autoriser les défrichements de forêts relevant de la sylviculture monospécifique à vocation industrielle. Cette autorisation se fait sans préjudice des obligations associées à la procédure d’autorisation environnementale et doit être accompagnée d’un moratoire sur la transformation de forêts multiessences en forêts monoessences. »
• Interdire l’installation de centrales au sol sur les espaces naturels, au sens du droit de l’urbanisme, au titre de la biodiversité remarquable voire ordinaire, et dans les zones de protection de la biodiversité. Ces zones d’exclusion seront identifiées par les documents d’urbanisme (SCoT, PLU), en se fondant sur des critères scientifiques préalablement établis comme ceux relatifs aux cœurs de biodiversité et connectivités biologiques existants ou à recréer. Elles seront définies par les collectivités locales en concertation avec les associations locales de protection de l’environnement. La cartographie répertoriant les zones d’exclusion sera régulièrement revue. En cas d’impacts potentiels des projets d’installation sur des espaces naturels voisins, sont saisies pour avis les Commissions De Préservation des Espaces Naturels, Agricoles et Forestiers (CDPENAF sous réserve que leur composition soit réformée), les Commissions Départementales de la Nature, des Paysages et des Sites (CDNPS), et les services de l’État. L’identification de ces zones se fait sans préjudice de la réalisation des études d’impact environnemental réglementaires pour chaque projet.
● Proscrire les centrales flottantes sur plans d’eau naturels et plans d’eau dotés d’un intérêt écologique substantiel. Sur les autres types de plans d’eau, appliquer le même régime juridique que celui prévu pour les centrales solaires au sol, notamment en matière d’évaluation environnementale (voir ci-dessous).
● Favoriser l’installation de centrales sur les délaissés d’infrastructures de transports.
- Préciser le nouveau cadre applicable à l’agrivoltaïsme pour s’assurer de ses effets positifs sur l’activité agricole
● Le modèle économique de l’agrivoltaïsme ne doit pas remettre en cause la position non négociable du monde paysan selon laquelle, toutes les paysannes et tous les paysans doivent pouvoir vivre des revenus issus de la production agricole. Il ne doit pas déstabiliser les équilibres trouvés et les efforts menés dans ce sens par les agriculteurs.trices et les syndicats de paysan.nes. Il doit en revanche permettre d’apporter des solutions aux problématiques du logement, des retraites, du revenu des ménages et du statut de conjoint collaborateur, souvent synonyme de grande précarité pour les femmes. Il doit aussi fournir des recettes fiscales aux collectivités locales pour contribuer au financement des services publics en zone rurale et aux investissements publics dans les territoires.
● Sur les espaces agricoles, n’autoriser que les seules installations agrivoltaïques dont la définition légale, présentée dans l’exposé des motifs, doit être précisée comme suit :
- La production agricole doit courir sur toute la durée d’exploitation énergétique et bénéficier d’un suivi obligatoire avec zone témoin et transmission des données aux services de l’Etat.
- Le service apporté à la parcelle par l’installation agrivoltaïque doit être direct, argumenté et les bénéfices agronomiques doivent être appliqués spécifiquement à la pratique agricole concernée par l’installation PV (ex : apport d’ombrage pour des arbres fruitiers, gestion de l’hygrométrie …).
- La notion de production agricole significative, que l’installation agrivoltaïque doit garantir pour être considérée comme telle, s’entend comme la combinaison de la quantité et de la qualité de la production. Ainsi, la mise en œuvre d’un projet de transition agroécologique vers le bio ne doit pas être considéré comme une dégradation de production, même si les rendements agricoles de l’installation agrivoltaïques sont plus faibles que ceux qu’auraient entraîné une installation conventionnelle.
- Seuls les projets permettant une amélioration de la production agricole, un maintien (en termes de quantité et qualité) ou une diminution inférieure à 10% du rendement peuvent être considérés comme agrivoltaïques.
- Le fait pour la production agricole d’être l’activité principale s’apprécie au regard du volume et de la qualité de la production et non uniquement de son volume.
- Le revenu issu de la production agricole de l’installation agricole doit non seulement être durable mais ne pas diminuer.
- Les bâtiments et délaissés de la ferme doivent être équipés de panneaux photovoltaïques au préalable ou en parallèle de la pose sur terrain agricole sous conditions de faisabilité techniques et économiques.
- L’exploitant agricole a la possibilité de s’impliquer de manière décisive dans la conception, le financement, la gestion et le démantèlement de l’installation photovoltaïque. Il bénéficie, pour les questions d’ordre agricole, de modalités de participation spécifiques.
- L’agriculteur peut demander aux services de l’Etat une évaluation de l’installation et l’examen de son caractère bénéfique pour l’agriculture aux fins d’anticiper un éventuel démantèlement.
- Un espace de dialogue permanent, pérenne et régulièrement convoqué, est mis en place le plus en amont possible afin de faciliter les échanges entre énergéticien, exploitant agricole et propriétaire foncier.
● Inscrire dans la loi l’absence d’utilisation de produits phytosanitaires dans les installations agrivoltaïques afin de favoriser la transition agro-écologique et éviter l’usage d’herbicides destinés au maintien d’une végétation rase sous les panneaux.
● Faciliter les efforts de recherche et développement publics pour identifier les filières où l’agrivoltaïsme fonctionne et sous quelles conditions mais aussi identifier les filières où il ne fonctionne manifestement pas et pour lesquelles il sera donc interdit. Cette systématisation des résultats par la R&D vaut tant pour les cultures que pour l’élevage. Elle devrait faciliter le travail des services instructeurs en éliminant automatiquement les projets qui relèvent de l’affichage promotionnel. Dans les cas de projets existants qui relèveraient de l’affichage ou lorsque l’activité agricole s’arrête, faire respecter l’obligation de démontage des installations PV et de restaurer les terres agricoles.
● Créer un appel d’offres de la Commission de Régulation de l’Énergie spécifique à l’agrivoltaïsme distinct du PV au sol classique. Les panneaux fixes, dit « low tech », seront prioritaires par rapport aux technologies high tech à panneaux mobiles, plus coûteuses. Concrètement, l’agrivoltaïsme, actuellement dans la catégorie spécifique « solaire innovant », des appels d’offre CRE, en sortirait pour être pris en charge par un dispositif dédié. La catégorie solaire innovant serait maintenue pour les seules centrales à panneaux pivotants, dédiées aux productions à haute valeur ajoutée où la technologie mobile se justifie par un intérêt substantiel pour l’activité agricole. Cette priorisation du fléchage des financements publics ne remettra pas en cause la primauté de l’activité agricole sur l’activité énergétique, assurée par l’étude préalable agricole.
● Sur la lutte contre la spéculation foncière, dans l’attente d’une réglementation foncière protectrice des paysan·ne·s que nous appelons de nos vœux :
- Plafonner les loyers versés par les développeurs aux propriétaires de terrains agricoles au même niveau que le plafond prévu pour les baux agricoles.
- N’autoriser que les installations dans laquelle l’exploitant agricole est propriétaire du foncier équipé ou titulaire d’un bail rural. Proscrire les conventions de mise à disposition signées entre paysan.nes et énergéticien.
- Plafonner le prix de cessions des terrains agricoles vendus pour la mise en place d’installation agrivoltaïque au prix usuels de vente dans la région, associé à un strict contrôle de l’interdiction des pas de porte.
- S’assurer de l’application du nouvel article L. 314-38 du code de l’énergie créé par la loi d’accélération des EnR qui prévoit de garantir l’éligibilité de la surface agricole d’accueil de l’installation agrivoltaïque aux aides directes de la PAC.
- Interdire tout projet sur des parcelles ayant été préemptées pour de l’agrandissement alors qu’il y avait un projet de transmission, pendant une durée de 20 ans, afin de lutter contre la logique de création d’unités foncières à vocation photovoltaïques et non agricoles.
● Sur l’étude préalable agricole :
- Rendre obligatoires les prescriptions de l’étude préalable agricole, arrêtées par le préfet, et s’assurer de leur bonne application aux installations agrivoltaïques sous peines de poursuites.
- Renforcer la prévalence des mesures d’évitement et de réduction sur celles de compensation, notamment financière, afin de mieux faire respecter l’esprit de la loi en s’appuyant notamment sur un système de planification régionale et intercommunale (cf bloc de propositions portant sur la planification).
- Uniformiser les méthodes d’estimation des impacts des projets qui souffrent d’un manque de clarté, causant des divergences d’interprétation selon les départements. Le seuil de déclenchement de l’étude préalable agricole sera harmonisé nationalement.
- Étendre le champ de l’étude en y incluant l’analyse des circuits alimentaires territoriaux et des autres débouchés agricoles (textile, construction…), ainsi que la notion d’adaptation au changement climatique afin de recentrer l’étude sur les interactions entre agriculture, alimentation et environnement plutôt que sur la seule économie agricole.
- Mieux articuler la procédure de l’étude préalable agricole et de l’évaluation environnementale afin d’assurer la cohérence des séquences ERC (Eviter, Réduire, Compenser) respectives.
- Des adaptations du projet photovoltaïque aux évolutions potentielles des pratiques agricoles (espèces, variétés, itinéraires techniques) sont identifiées.
● Encourager une juste répartition des revenus entre exploitant agricole, propriétaire foncier et énergéticien. Pour ce faire, une partie des flux financiers générés par la vente d’électricité (et non plus des loyers) par la société de projet agrivoltaïque, devraient financer des mécanismes favorables aux agriculteurs qui permettrait entre-autres de :
- faciliter la transmission foncière par exemple via des offices fonciers agricoles
- contribuer au financement de l’installation de jeunes agriculteurs
- contribuer à la formation des travailleurs agricoles
● Pour lutter contre une certaine logique productiviste qui nous éloigne de l’objectif de sobriété cher à l’écologie politique, les projets agrivoltaïques ne pourront pas dépasser 50 MWc d’un seul tenant.
- → Améliorer l’anticipation et le suivi des effets des centrales au sol sur espaces artificialisés délaissés
● Préciser les missions de l’Observatoire des énergies renouvelables et de la biodiversité, créé par la loi d’accélération des EnR : prévoir qu’il bénéficie de l’acquisition de données relatives au statut urbanistique et environnemental (analyse des impacts biodiversité, suivi du projet agricole…) des zones occupées par des installations de production d’énergie renouvelable en rendant obligatoires les remontées des donnés d’exploitation des gestionnaires de site ; s’assurer qu’il bénéficie d’une enveloppe suffisante pour orienter le financement de la recherche publique sur son domaine d’intervention.
● Mettre toutes les données disponibles en matière d’étude préalable et de suivi de biodiversité des centrales solaires au sol en open data pour qu’elles puissent servir à la recherche et au suivi macro des installations de manière centralisée et accessible via cartographie sur un site Internet dédié.
● Renforcer les effectifs et la formation aux enjeux énergie-climat des DREAL (Direction régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement) et des DDT (Direction départementale des Territoires)pour un meilleur contrôle des projets : a priori afin d’éclairer la décision préfectorale d’autoriser ou non ces derniers ; a posteriori afin de s’assurer de l’application à long terme de la séquence ERC.
● Accroître l’effectivité des sanctions en cas de non-respect des mesures prévues dans l’arrêté autorisant les projets et dans les autorisations complémentaires éventuelles (par exemple, les obligations de compensation pour défrichements).
● Maintenir voire accroître le niveau d’exigence de l’évaluation environnementale concernant les friches pour s’assurer de la protection de la biodiversité lorsqu’elle s’y est développée.
● Accroître le financement de la recherche publique sur les impacts écologiques des centrales au sol. Elle s’inscrirait dans le cadre plus général du rehaussement des ressources allouées à l’enseignement supérieur et à la recherche.
- Accroître les bénéfices sociaux, économiques et environnementaux des projets
● Pour les projets de centrales solaires non soumis au régime de partage territorial de la valeur des énergies renouvelables, créé par la loi d’accélération des EnR, c’est-à-dire à ceux ne bénéficiant pas de dispositifs de soutien public, renforcer la fiscalité des installations PV par exemplesur le modèle de la fiscalité des éoliennes afin de faire bénéficier les collectivités locales des retombées économiques des projets et de mieux partager la valeur créée.
● Mener une politique de soutien massif aux projets citoyens de production d’énergies renouvelables en facilitant l’accès au soutien public, par l’introduction de bonus substantiels dans les appels d’offre et par la régionalisation des tarifs d’achats de guichet pour le photovoltaïque, mais aussi en assouplissant les réglementations financières applicables ou les coûts de raccordement au réseau électrique.
● Accroître l’offre de formation initiale pour les photovoltaïcien·ne·s afin d’assurer la montée en compétence d’un maximum de personnes en prévision de la future hausse de la demande. Pour mémoire, ces emplois seront non délocalisables, donc bénéfiques à l’économie du pays.
● Mener une politique d’insertion par l’emploi dans le cadre de l’installation et de la maintenance des panneaux.
- Garantir la probité des parties prenantes des projets
● Revoir la composition des CDPENAF (Commission De Préservation des Espaces Naturels, Agricoles et Forestiers) en y intégrant davantage de représentants d’associations œuvrant à la protection de l’environnement, en y accroissant la pluralité des représentants du monde agricole, notamment des syndicats minoritaires œuvrant en faveur de l’agriculture biologique, et en y ajoutant une composante technique.
● Rendre obligatoire la formation des membres des CDPENAF aux enjeux énergie-climat et aux documents de planification énergétique locaux.
● Garantir la transparence des travaux des CDPENAF en rendant ceux-ci accessibles au public et en actant une stricte indépendance vis-à-vis des développeurs et de l’ensemble des parties prenantes,dans le cadre de l’orientation générale du parti pour la prévention des conflits d’intérêts.
● Accroître les garanties d’indépendance des bureaux d’études en étendant la portée de l’expérimentation, prévue par la loi d’accélération des EnR, d’une certification des bureaux d’études intervenant dans le cadre de la procédure d’évaluation environnementale des projets de production d’énergie renouvelable.
● De manière générale, former et contrôler davantage pour garantir la qualité des études d’impact qui se multiplient. Les bureaux d’études sont peu nombreux et ont donc un pouvoir de marché important ce qui peut être source de risques éthiques.
- Soutenir la réapparition d’une filière européenne de production de panneaux
● À court terme, l’État se doit d’inciter les développeurs, notamment par des clauses contenues dans les appels d’offres CRE, à privilégier davantage des critères sociaux, notamment relatifs aux droits humains, dans le choix des matériels, au-delà de la seule notation environnementale des panneaux prévue par le droit actuel. Une politique d’achat matériel socialement et environnementalement responsable de la part des entreprises est seule à même de soutenir l’apparition d’une filière nationale.
● En parallèle de la croissance de la production industrielle européenne, favoriser prioritairement l’achat de panneaux photovoltaïques en provenance de l’Union.
● À court et moyen terme, accroître substantiellement les investissements publics dans ce secteur et accompagner le développement des nouveaux acteurs en s’appuyant sur l’octroi dustatut de « projet important d’intérêt européen commun » (IPCEI)à la création d’une industrie européenne du photovoltaïque, actée en mai 2022. Cela permettra de verser des subventions au secteur par dérogation au droit de la concurrence et ainsi de mieux répondre aux productions asiatiques et nord-américaines.
● Flécher davantage de financement public vers les filières de recyclage afin de tendre encore un peu plus vers un taux de recyclabilité proche des 100%.
● Encourager le repowering des centrales anciennes avec des cellules plus efficientes pour accroître leur production donc réduire les besoins globaux en espaces à équiper. Cela permettra également de nourrir un marché de l’occasion du photovoltaïque permettant des installations sur bâtiments, moins coûteuses donc plus accessibles aux ménages.
- Conformément à l’exposé des motifs et dans l’objectif d’outiller les militant·e·s ayant besoin d’évaluer des projets photovoltaïques, le parti produira un document synthétisant la présente motion d’ici à 4 mois.
Unanimité pour
Retour sur les motions adoptées par le Conseil fédéral d’Europe Écologie Les Verts des 1er et 2 juillet 2023