Exposé des motifs
Un conflit ancien aux conséquences humanitaires déplorables
Depuis le 12 décembre 2022, l’Azerbaïdjan impose aux populations du Haut-Karabakh un blocus total qui plonge cette région de l’Europe dans une crise humanitaire déplorable.
Le conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan dans le Haut-Karabakh est ancien. En 1921, le Haut-Karabakh, majoritairement peuplé d’Arméniens, a été rattaché à la République soviétique d’Azerbaïdjan. Dans le contexte de dislocation puis d’implosion de l’URSS, une première guerre sanglante a eu lieu entre 1988 et 1994 faisant près de 30 000 mort·e·s et des centaines de milliers de réfugié·e·s.
Des initiatives diplomatiques, peut-être insuffisantes, ont été mises en œuvre. Lors de la première guerre, dès 1992, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a mis sur pied le Groupe de Minsk – une assemblée co-présidée par la Russie, les États-Unis et la France – pour trouver une issue diplomatique et pacifique au conflit. Un cessez-le-feu est imposé en 1994. Les Arméniens ont pris le contrôle du Haut-Karabakh ainsi que celui de territoires environnants, alors peuplés majoritairement d’azéris.
Mais le conflit continue de sévir et de toucher les populations civiles, entraînant peur et misère. Les initiatives diplomatiques mises en place depuis 30 ans n’ont pas permis de mettre fin à ce conflit meurtrier qui continue à menacer la paix en Europe. Les Européen·ne·s ne peuvent rester indifférent·e·s à ce qu’il se passe dans cette partie de l’Europe et doivent redoubler leurs efforts pour chercher des solutions diplomatiques et pacifiques.
Une escalade inquiétante
Suite à la révolution arménienne de 2018 et la prise de distance du nouveau Gouvernement vis-à-vis du régime de Poutine, la Russie a cessé de soutenir l’Arménie au Haut-Karabakh. A l’automne 2020, profitant de cette nouvelle situation, l’Azerbaïdjan a lancé une guerre, avec le soutien matériel et / ou humain de certaines puissances étrangères comme la Turquie et Israël . Un accord de cessez-le-feu a été négocié sous l’égide de la Russie. Selon cet accord, près des deux tiers du territoire occupé par l’Arménie entre 1991 et 2020 et près du tiers du Haut-Karabakh sont passés sous le contrôle de l’Azerbaïdjan, ce qui a conduit à un exode massif des Arméniens du Haut-Karabakh. L’accord prévoyait le déploiement d’une force d’interposition russe afin de garantir la sécurité des liaisons entre l’Arménie et le Haut-Karabakh via le corridor de Latchin.
Mais dans la nuit du 12 au 13 septembre 2022, Alyev, le dictateur azerbaïdjanais, a rompu le cessez-le-feu profitant de la diminution de la présence russe dans la région et de l’attention portée sur la Guerre en Ukraine. L’Azerbaïdjan a attaqué le territoire de la République d’Arménie reconnu par la communauté internationale. La force d’interposition russe n’a pas réagi. Bien que l’Arménie et l’Azerbaïdjan se soient engagés à reconnaitre leur intégrité territoriale en octobre 2022, l’Azerbaïdjan a continué son offensive. L’Azerbaïdjan a organisé un blocus méthodique du Haut-Karabakh : coupures d’alimentation en gaz, en électricité et fermeture du corridor de Latchin dès le 12 décembre 2022. La situation dans les établissements de santé est très critique et de nombreuses écoles ont fermé. Le gouvernement azerbaïdjanais essaye de manipuler l’opinion publique en faisant croire que le blocus qu’elle impose serait mené par des « militants écologistes » manifestant contre « l’exploitation illégale » de minerais.
Faire respecter le droit à l’auto-détermination pour la paix en Europe : l’Union européenne à un rôle de médiation à jour
L’offensive du dictateur azerbaïdjanais est particulièrement inquiétante. Alyiev cache à peine son objectif d’épuration ethnique. Il conseille à la population arménienne de quitter le Haut-Karabakh dans les camions de la force d’interposition russe. Comme tous les autocrates, il conforte son pouvoir par un discours nationaliste et démagogique sur la « réunification » de peuple Azéri, depuis le Sud de l’Arménie, jusqu’au Nord de l’Iran.
Alors qu’une nouvelle guerre est à craindre dans cette région d’Europe, les pays de l’Union européenne ferment les yeux et continuent d’acheter à l’Azerbaïdjan de grandes quantités de gaz – y compris du gaz russe transitant par l’Azerbaïdjan. Pourtant l’Union européenne doit agir pour éviter une catastrophe humanitaire. L’Union européenne est appelée à assumer un véritable rôle de médiation pour la sécurité en Europe. Nous ne devons pas laisser la Russie assumer seule ce rôle et laisser l’Arménie dans une situation de dépendance vis-à-vis de la Russie. La paix dans cette région passe par le respect du droit à l’autodétermination dans le Haut-Karabakh.
Motion
Considérant ce qui précède, Europe Écologie Les Verts :
– Demande le respect du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et du principe d’autodétermination dans le Haut-Karabakh ;
– Condamne l’emploi de la force par l’Azerbaïdjan sur le territoire du Haut-Karabakh, les actions de blocage menées par l’Azerbaïdjan et appelle au respect de la liberté de circulation le long du corridor de Latchin ;
– Dénonce l’instrumentalisation de la cause environnementale par le gouvernement Azerbaïdjanais ;
– Demande la mise en place de garanties de sécurité et de protection de la population du Haut-Karabakh, le droit pour les personnes déplacées à retrouver leurs foyers et la libération et le rapatriement de tous les prisonniers de guerres arméniens sous l’égide notamment du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR) ;
– Appelle la communauté internationale à prendre des mesures pour protéger le patrimoine culturel arménien ;
– Demande l’envoi d’une aide humanitaire effective sur le territoire du Haut-Karabakh ;
– Réclame la mise en place de négociations et le déploiement d’une force d’interposition dans le cadre du droit international du fait du constat d’échec de la médiation russe ;
– Demande à ce que la France et l’Union européenne appliquent des sanctions à l’encontre de l’Azerbaïdjan pour qu’il se retire immédiatement du territoire du Haut-Karabakh et favorise toute initiative, citoyenne et diplomatique, visant à établir une paix durable entre les deux pays dans le cadre du droit international ;
– Demande que la France accroisse ses efforts, au sein du Conseil de sécurité de l’ONU, pour rechercher des solutions diplomatiques et pacifistes de résolution du conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan dans le Haut-Karabakh
– Appelle l’Union européenne à jouer un véritable rôle de médiation dans le conflit au Haut-Karabakh et à étudier la possibilité du déploiement de missions de maintien de la paix au Haut-Karabakh dans le respect du droit international.
Unanimité pour
Retour sur les motions adoptées par le Conseil fédéral d’Europe Écologie Les Verts des 4 et 5 février 2023