Exposé des motifs

A peine la loi travail XXL adoptée, le projet de loi de finances 2018 est arrivé dans l’hémicycle avec son lot de mesures antisociales : mort de l’Impôt sur la fortune ; création d’un prélèvement forfaitaire unique, amputation de la TTF française de la taxation des opérations infra-quotidiennes, remplacement du CICE (crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, coût :16 milliards d’euros), par un allègement pérenne de cotisations sociales patronales, réduction de l’impôt sur les sociétés, baisse des APL pour tous les locataires et pour les bailleurs sociaux, suppression des cotisations santé et chômage qui s’accompagne du relèvement de la CSG.

Toutes ces mesures s’intègrent évidemment aux politiques publiques annoncées pour le quinquennat 2017-2022. Elles sont dans la droite ligne de celles menées depuis le début des années 1980. Il s’agit de défaire les institutions de la sécurité sociale, de la fonction publique et du droit du travail pour étendre la logique capitaliste en matière de travail.

Les projets de Macron concernant la refonte du droit du travail vont rendre les licenciements encore plus faciles et moins coûteux pour les employeurs, par le plafonnement des indemnités prud’homales accordées en cas de licenciement abusif, par le développement de nouveaux contrats « de chantier » ou « de projet », ce qui revient à restaurer le travail à la tâche.

Concernant le chômage, les mesures annoncées sont les suivantes :

  • Suppression de l’UNEDIC, gérée par les « partenaires sociaux », remplacée par une gestion étatique de l’assurance chômage.
  • Mise en place d’un « régime universel » de chômage qui garantirait des revenus aux travailleurs indépendants ainsi qu’aux salariés démissionnaires (« droit aux allocations une fois tous les cinq ans aux démissionnaires »)
  • Durcissement des contrôles des chômeurs (radiation en cas de refus d’offres d’emploi « décentes »), report de l’âge minimal à partir duquel la durée maximale d’indemnisation est allongée (3 ans au lieu de 2).
  • Surtout, suppression des cotisations dites « salariales[1]» (2,4 % du salaire brut), remplacées par une hausse de la Contribution sociale généralisée (CSG).

« Nous pourrions aller vers un régime forfaitaire, avec le versement d’une allocation qui est la même pour tout le monde comme en Angleterre. Ou encore copier le modèle de l’Allemagne et son dogme libéral, qui sont la boussole d’Emmanuel Macron », craint Denis Gravouil, en charge des questions d’emploi à la CGT.

En effet, Macron est prêt à accorder de nouveaux droits en contrepartie de la fin du paritarisme et de nouvelles attaques contre la cotisation sociale. Car le véritable objectif de Macron, et de la classe dirigeante, n’est pas de « prendre aux pauvres pour donner aux riches ». C’est de supprimer définitivement la sécurité sociale « à la française ». Pour cela, en matière de chômage, comme de retraite, comme de santé, il va développer deux piliers :

  • Le premier est un régime unique dotant inconditionnellement les individus d’une allocation minimum financée par l’impôt.
  • Le second s’appuie sur la « contributivité » des revenus : plus les individus auront été économiquement performants plus ils auront des droits élevés au revenu (droits à la formation, à la retraite, etc.)

La philosophie anticapitaliste de la sécurité sociale était tout autre : chacun était reconnu comme travailleur productif et à ce titre avait droit à un salaire, financé par des cotisations sociales (une part croissante des salaires), gérées à l’origine par les travailleurs eux-mêmes (salariés élus aux conseils d’administration des caisses et majoritaires face au patronat). Et il s’agissait là d’une attaque mortelle contre l’ordre capitaliste. C’est cela que tous les gouvernements détricotent depuis le milieu des années 1980. C’est pourquoi ils mettent systématiquement en avant le revenu (financé par l’impôt, principalement la CSG) contre le salaire (financé par la cotisation). C’est pourquoi encore ils défendent le revenu minimum étatique et font dépendre les « prestations sociales » de la bonne performance économique des personnes (sur le mode « j’ai cotisé, j’ai droit », cela donne en matière de chômage « une journée travaillée – une journée indemnisée »).

Ainsi, la suppression des cotisations salariales (à hauteur de 2,4 %, la cotisation patronale de 4 % demeurant, elle, toujours en place) pour financer l’assurance-chômage, remplacées par la hausse de 1,7 point de la CSG, aura pour effet de déconnecter le niveau de salaire de celui des allocations chômage. Et achèverait de faire perdre au régime actuel sa vocation assurantielle et universelle.

Que pouvons-nous défendre ?

Ne devons-nous pas inscrire dans notre agenda une réflexion contre l’étatisation de l’UNEDIC et de la Sécurité Sociale, pour l’autogestion de ses caisses par les salariés eux-mêmes (administrateurs élus sur listes syndicales et associatives) ?

Ne devons-nous pas réfléchir, en s’inspirant de l’histoire de la Sécurité Sociale, et en particulier à ses débuts autogestionnaires, à la définition d’un nouveau statut pour les créateurs et créatrices de richesses que nous sommes toutes et tous quand nous rentrons dans la vie active, statut permettant d’acquérir de nouveaux droits démocratiques sur l’économie et le travail et sur la gestion des caisses de solidarité abondées par les cotisations salariales ?

Tandis que se déroule ce samedi 2 décembre la manifestation « contre le chômage et les précarités, pour des droits nouveaux à l’appel de AC ! L’APEIS, le MNCP, la CGT chômeurs et de nombreuses autres organisations,

Motion

Le Conseil fédéral d’EELV :

  • affirme son opposition aux attaques contre la Sécurité Sociale ;
  • affirme son engagement pour la préservation et l’amélioration d’un système de Sécurité Sociale public et universel ;
  • demande aux commissions post-croissance, économie-social et santé d’engager, avec l’appui de la fondation pour l’écologie politique et la participation la plus large possible des associations de chômeurs et des syndicats, des travaux sur l’avenir de l’UNEDIC et de la Sécurité Sociale et sur l’instauration de nouveaux droits démocratiques concernant l’économie, le travail et les enjeux écologiques.

Pour : 38 ; contre : 1 ; blancs : 14

[1]    La part dite « salariale » du taux de cotisation chômage n’est pas payée par les salariés : elle n’est pas venue réduire leurs salaires nets (ou directs). Elle provient d’une modalité de calcul qui fait intervenir un « salaire brut » qui n’a qu’une réalité comptable. Les cotisations sociales sont venues augmenter les salaires, par le versement de salaires indirects, passant par les caisses de Sécu, aux salariés chômeurs (ceux qui sont indemnisés…)

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