La crise grecque actuelle montre l’impasse dans laquelle se trouve l’Europe. Celle-ci constitue le dernier soubresaut d’une crise commencée en 2007 aux États-Unis avec la crise dite des « subprimes ». Elle est loin d’être uniquement une crise financière. La croissance américaine du début du XXIe siècle a été permise par la consommation effrénée des ménages, financée par crédit du fait de la baisse des salaires. Elle a buté sur des causes financières comme la hausse des taux d’intérêt, des causes économiques comme la hausse du chômage mais aussi écologiques comme la hausse du prix du pétrole, due à sa raréfaction. La hausse des dépenses énergétiques a amplifié les difficultés des ménages américains à rembourser leurs emprunts et provoqué la défaillance de nombreux ménages. Les dettes des uns étant les créances des autres, la faillite de ménages américains a contaminé d’autres acteurs économiques comme la banque d’affaire Lehman Brothers, l’assureur AIG. Aujourd’hui, ce sont des États qui sont en difficulté. Le soutien des États aux banques et la récession de 2009 ont provoqué une explosion des déficits publics et de la dette. Pour la zone euro, la part des déficits est passé de -0,6 % du PIB en 2007 à -6,3 % en 2009, celle de la dette de 66,5 % à 85 %. Mais la crise grecque comporte également des dimensions purement nationales dénoncées depuis longtemps par les Verts grecs : un système politique corrompu, une incapacité de l’État à lever correctement les impôts et à lutter contre l’évasion fiscale massive, un nationalisme dépassé qui bloque toute réduction des dépenses militaires surdimensionnées. Enfin, la situation macroéconomique grecque est spécifique.
En ne voulant pas restructurer la dette grecque et effacer une partie de celle-ci, l’Europe fait preuve d’irresponsabilité. La cure d’austérité sans équivalent imposée par la Troika (commission, BCE et FMI) ne font qu’aggraver la situation. Le premier plan grec n’a rien réglé si ce n’est doubler le nombre de chômeurs. La hausse de la charge de la dette et la récession, due à la politique d’austérité, ne réduisent pas le déficit public. On remplace des dépenses publiques utiles par des remboursements d’intérêt. A terme, si nous continuons sur cette voie, la Grèce sera obligée de sortir de la zone euro, ce qui signifie revenir au pire des phases spéculatives contre les monnaies nationales d’avant la création de l’Euro.
Pour éviter le pire, Europe Écologie-Les Verts :
- 1. soutient la lutte du peuple grec contre les mesures d’austérité imposées par le gouvernement. Compte tenu de l’importance des enjeux, de l’absence de débat à ce sujet lors des dernières législatives et du fossé qui se creuse entre le peuple grec et ses gouvernants, le recours au référendum, comme en Islande, a toute légitimité.
- 2. appelle les dirigeants européens à prendre en compte systématiquement l’interpellation de la société grecque
- 3. soutient la demande d’audit de la dette grecque comme l’Équateur l’a fait. Il faut lever le voile sur la rôle de Goldman Sachs dans le maquillage de la dette grecque, sur le poids des dépenses militaires, deux fois plus élevées qu’en France en pourcentage du PIB.
- 4. soutient que la dette grecque, contractée dans les années précédentes ne peut ni ne doit être payée intégralement mais que la Grèce doit garder un accès raisonnable aux crédits futurs, garantis par la solidarité européenne. En conséquence, l’Union européenne doit négocier le rééchelonnement de la dette grecque ; prêter à la Grèce des crédits nouveaux aux taux de la BCE et contrôler la mise en œuvre d’une réforme fiscale permettant de faire contribuer les contribuables aisés pour financer des services publics et la reconversion écologiste. (Alain Lipietz)
- 5. soutient l’initiative de Pascal Canfin de la création de l’ONG Finance Watch de proposer des analyses alternatives des marchés financiers.
- 6. Demande la création d’une agence de notation européenne publique pour évaluer les dettes souveraines.
- 7. revendique un contrôle accru des marchés dans les actes et pas seulement dans les discours. Cela passe notamment par l’interdiction de toute forme de spéculation contre les dettes souveraines et par la suppression des paradis fiscaux. Les pertes des banques en faillite doit être assuré par leurs actionnaires et non par les finances publiques, comme dans le cas de la faillite de Lehman Brothers.
- 8. demande une nouvelle politique économique européenne pour réduire les déséquilibres macroéconomiques européens. Car le déficit des pays dits périphériques est très largement le pendant des excédents réalisés par d’autres pays comme l’Allemagne ou l’Autriche.
- 9. demande une changement de la politique monétaire européenne et donc la modification des traités européens, en inscrivant dans le doit ce que les institutions européennes ont fait de manière exceptionnelle. La Banque centrale européenne doit pouvoir, en cas de tension ou pour financer uniquement des investissements nécessaires à la conversion écologique de l’économie, prêter directement aux États et racheter des bons du trésor nationaux. Les pays de la zone euro doivent être solidaires et garants de la dette de chacun des États, comme c’est le cas dans tout fédération politique.
- 10. demande le renforcement du budget européen jusqu’à 5 % du PIB, au lieu de 1% actuellement, et une meilleure coordination des politiques budgétaires nationales. Nous condamnons le renforcement du Pacte de Stabilité qui sera probablement définitivement adopté en septembre 2011. Il faut des politiques structurelles européennes qui permette de répondre à la crise écologique, notamment par le financement d’investissements via la Banque européenne d’investissement. Cela permettra également comme dans les années 1970-80, des transferts financiers vers les pays les plus faibles de l’Union européenne pour réduire les inégalités entre pays.
- 11. Demande le remplacement des politiques de concurrence fiscale qui empêche les États de lever suffisamment d’impôts par une harmonisation européenne fiscale commençant par l’impôt sur les bénéfices des sociétés multinationales et une taxation européenne des revenus financiers et des transactions financières.
- 12. Demande que la France prenne l’initiative d’une réforme des Institutions de Bretton Woods (FMI et banque mondiale), qui privilégient actuellement le dollar comme monnaie internationale, et encouragent la guerre des monnaie Le projet défendu de Keynes à Bretton Woods d’une monnaie internationale garantie par un panier de ressources naturelles pourraient être réactualisée.
- 13. soutient l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne ce qui permettrait de modifier la nature des relations entre la Grèce et la Turquie, de régler la question chypriote et de diminuer les dépenses militaires.
Pour : beaucoup ; contre : 2 ; abstention : 3
Décision CF-11-039
Retour au sommaire du Conseil Fédéral du 9 juillet 2011